Auguste Herbin est le secret le mieux gardé de l'aventure de l'art moderne. Il a pris une part active et déterminante à toutes les ruptures créatives du xxe siècle qu'elles aient été figuratives ou abstraites: post-impressionnisme, fauvisme, cubisme, objets monumentaux,
nouvelle figuration, pour aboutir à une abstraction singulière à visée universelle.
L'œuvre d'Auguste Herbin, "une somme à la manière d'une cathédrale gothique", selon les mots du critique Waldemar George, est en partie née à Montmartre, dans l'atelier du Bateau-Lavoir où il vécut dix-huit années, de 1909 à 1927, avant de s'installer rue Falguière.
Animé par la conscience de l'Absolu, l'artiste a cultivé de son vivant la discrétion d'un travailleur acharné. Son œuvre est celle d'un acteur primordial de la modernité.
Le musée de Montmartre Jardins Renoir est le premier musée parisien à consacrer à ce maître une exposition rétrospective, dans la ville où il a créé toute sa vie.
Toutes les œuvres présentées sont d'Auguste Herbin sauf mention contraire.
Autoportrait
1903
Huile sur toile
Donation de l'artiste, 1956
Musée Matisse, Département du Nord,
Le Cateau-Cambrésis
Inv. 1956-1
Une vocation précoce
La vocation d'Herbin est précoce. Âgé de 14 ans, il suit les cours dispensés par la première école municipale de dessin créée au Cateau-Cambrésis en 1874. Élève doué, il y reste quatre ans et obtient plusieurs médailles puis une bourse au mérite de la municipalité en 1900 afin d'étudier à l'École des Beaux-Arts de Lille sous la direction de Pharaon de Winter. Les premières œuvres d'Herbin témoignent déjà d'un grand savoir-faire: la touche est délicate, les accords de couleurs subtils et harmonieux, et les compositions très équilibrées. Portraits, paysages, natures mortes, le jeune artiste est à l'aise dans tous les genres. On lit dans ses peintures l'influence de l'impressionnisme découvert à Bruges lors d'un voyage d'étude. Cet attrait pour l'impressionnisme conduit à la rupture avec son professeur, maître trop académique à son goût. En 1901, il quitte Lille pour faire carrière à Paris.
Paysage nocturne à Lille
1901
Huile sur toile
Paris, Collection Lahumière
Toits de Paris sous la neige
1902
Huile sur toile
Collection particulière
Courtesy Conseil en Art, BNP Paribas Banque privée
Le Soleil
1902
Huile sur toile
Pays-Bas, Otterlo, Kröller-Müller Museum
Inv. KM 109.059
Nature morte aux grenades
1904
Huile sur toile
Collection particulière
Dépôt au Musée Matisse, Département du Nord, Le Cateau-Cambrésis
Inv. D 2021-1
Natures mortes, paysages ou portraits, les premières oeuvres d'Herbin combinent un attrait pour l'impressionnisme et pour la peinture flamande. La Nature morte aux grenades est un très bel exemple de l'influence de l'âge d'or flamand sur Herbin et notamment dans le traitement de la transparence du verre.
Le fauve
Dès 1902, Herbin propose sa peinture au légendaire Père Soulier qui lui achète un paysage. À partir de 1904, Wilhem Uhde, Clovis Sagot et les plus grands marchands d'art moderne s'intéressent à sa peinture et l'exposent régulièrement. En 1905, sous l'influence de Cézanne et de Van Gogh, ses maîtres, les couleurs de sa palette explosent, la touche se divise, les volumes se géométrisent; Herbin est un peintre fauve reconnu comme tel. Il expose pour la première fois sa peinture dans des grands Salons, d'abord à Lille en 1905 où ses portraits et paysages sont remarqués pour leur audace, puis à Paris en 1906 au Salon des Indépendants. Sa vision plastique s'enrichit au gré de ses voyages: Corse, Hollande, Allemagne, Belgique. En 1908, le critique d'art américain Gellett Burgess en fait le plus fauve des huit peintres qu'il considère comme les représentants de la nouvelle peinture: Picasso, Derain, Matisse, Braque, Metzinger, Czobel, Othon Friesz.
Non identifié
Portrait du peintre Battaglia
1906
Huile sur toile
Collection particulière
Le peintre Battaglia, avec sa blouse, auquel Herbin consacre trois tableaux, appartient presque
déjà à un autre monde. Mathieu (Matteo) Battaglia dont on sait peu de choses, sinon qu'il est membre fondateur du Salon des Indépendants en 1884, est né en 1852 à Brusimpiano en Italie et a vécu à la Ruche. Il participe à plusieurs reprises au Salon des Indépendants et c'est peut-être là qu'Herbin le rencontre. Le peintre André Claudot a fait également son portrait (en pied) ce qui semble indiquer qu'il avait une certaine aura auprès des jeunes peintres. Il meurt en 1927 dans la misère au Kremlin-Bicêtre
Autoportrait
1906
Huile sur toile
Pays-Bas, Otterlo, Kröller-Müller Museum Inv. KM 106.453
Herbin réalise toute sa vie des autoportraits et des portraits de ses proches. Il sait saisir dans ses œuvres la complexité et la profondeur des modèles. Dans cet autoportrait costumé, il se représente avec les attributs traditionnels du peintre, aux antipodes de l'image bohème de l'artiste. La touche dynamique provient de Van Gogh et les couleurs sortent telles quelles des tubes, sans souci d'imitation. Herbin était entré de plain-pied dans le fauvisme dès 1905. Ce violent chromatisme fait écrire à Gelett Burgess, critique d'art américain qui lui rend visite en 1908: "la marque du fauve est partout".
Portrait de jeune fille
1907
Huile sur carton
Wuppertal, Von der Heydt-Museum Inv. G 0719
Portrait d'Auguste Herbin au milieu des toiles de Picasso, dans l'atelier [de Picasso]
du 11 boulevard de Clichy, Paris
Photographie (aristotype) de Pablo Picasso, 1911 Don Succession Picasso, 1992 Paris, Musée national Picasso
Inv. APPH2815
© Succession Picasso 2024
<< D'instinct par besoin naturel je me suis intéressé à la couleur parce qu'il paraît que les peintres du nord sont très coloristes. >>
Auguste Herbin, entretien audio avec Jack Kouro, 30 novembre 1959 Courtoisie Galerie Le Minotaure, Paris
La nouvelle peinture
Dès les débuts du cubisme, Herbin est - avec Picasso, Gleizes, Metzinger, Braque et Gris - au premier rang. Il participe à de nombreuses expositions de ce groupe que la critique appelle « la nouvelle peinture >>. Son cubisme montre une inclination pour la synthèse et la géométrie, sa palette, elle, fait montre d'une grande sensibilité à la couleur. Il est cité par tous les premiers historiens du cubisme, qui sont aussi ses témoins directs, comme André Salmon, Jacques Rivière ou Guillaume Apollinaire. En 1913, sa carrière est déjà internationale et plusieurs expositions lui sont consacrées en Allemagne, en Angleterre, en Suisse. Ses œuvres sont conservées dans de grandes collections européennes, dont celles du russe Sergueï Chtchoukine et de l'allemand Henry B. Simms.
Portrait d'Erich Mühsam
1907
Huile sur toile
Paris, Collection Lahumière
Ce tableau fauve représente le portrait d'une figure de premier plan: l'écrivain anarchiste allemand Erich Kurt Mühsam (1878-1934). Herbin le rencontre à Paris au cours de l'été 1907, certainement au Lapin Agile sur la butte Montmartre, dans le sillage du critique, collectionneur et marchand allemand Wilhem Uhde. Plusieurs fois arrêté, Mühsam est une figure clé de la gauche révolutionnaire allemande, qui dénonce sans relâche la montée du nazisme, dès 1922. Arrêté au lendemain de l'incendie du Reichstag, il est assassiné par les SS en juillet 1934, au camp de concentration d'Orianenburg.
La Place Maubert
1907
Huile sur toile
Collection particulière
Le Vieux Pont à Bruges
1906
Huile sur toile
Collection privée
Courtesy Galerie Jean-François Cazeau
Bruges occupe une grande importance dans l'œuvre d'Herbin car il y découvre en 1901 la peinture impressionniste et les maîtres flamands. "À Bruges il y a des choses magnifiques. Il y a Memling, il y a Van Eyck, ça c'est de grands peintres et cela m'a beaucoup intéressé, d'ailleurs j'y suis allé plusieurs fois à Bruges et j'ai fait des paysages parce que cette ville est intéressante, il y a des canaux, il y a des vieux ponts" dit-il lors d'un entretien avec Jack Kouro en 1959. Le Vieux Pont à Bruges illustre le passage du post- impressionnisme au fauvisme
Nu assis
Vers 1913
Encre sur papier
Donation de Henry-Thomas, 1976 Paris, Musée d'Art moderne
Inv. AMD 929
Vase de roses sur une table
1910
Aquarelle sur papier
Collection particulière
Route muletière
et maison à Céret
Août 1913
Huile sur toile
Donation de Henry-Thomas, 1976 Paris, Musée d'Art moderne
Inv. AMVP 2423
Ce paysage date du premier des trois séjours qu'Herbin effectue à Céret, devenue «la Mecque du Cubisme». C'est probablement encouragé par Picasso, rencontré en 1909, qu'il s'y rend la première fois en 1913. Il reste à l'écart de ses acolytes du Bateau-Lavoir dont les recherches portant sur le cubisme synthétique sont alors proches des siennes. La voie d'affranchissement de la réalité d'Herbin n'en est pas moins singulière dans l'agencement des formes, l'exaltation des couleurs et dans la grande lisibilité. Les nombreux paysages peints par Herbin à Céret témoignent de sa fidélité au leitmotiv de Cézanne: L'art est une harmonie parallèle à la nature.
Un cubisme haut en couleur
En 1913, Herbin fait un long séjour à Céret devenu le « Barbizon du cubisme >>. S'y retrouvent, entre autres, Picasso et Gris. À Céret, le cubisme analytique d'Herbin évolue en tendant de plus en plus vers la synthèse. Les éléments figurés ou les paysages sont réduits à leur pure essence: la forme géométrique. Le fond et la forme fusionnent pour toujours plus d'unité. Et tandis que ses homologues font disparaître la couleur en même temps que l'objet, Herbin pour sa part multiplie les œuvres aux contrastes colorés riches et vifs.
Herbin est mobilisé de 1914 à 1916 dans le service auxiliaire
(peintures de camouflages); sa production diminue drastiquement. Plusieurs compositions sont franchement abstraites et, en 1916, il est un des cubistes synthétiques les plus caractéristiques du mouvement
Compotier, carafe et oranges
1912
Huile sur toile
Pays-Bas, Ottelo, Kröller-Müller Museum
Inv. KM 100.914
Paysage à Hardricourt
1911
Huile sur toile
Pays-Bas, Otterlo, Kröller-Müller Museum Inv. KM 103.752
Nature morte au chapeau
1908
Huile sur carton
Genève, Bailly Gallery
Ce tableau est un autoportrait intime de l'artiste. Depuis 1901, il habite à Paris dans une petite chambre mansardée, rue du Regard, dont une description a été faite par le critique d'art américain Gelett Burgess. Il y vit entouré d'éléments décoratifs, notamment de vases que l'on retrouve dans ses natures mortes. Les peintures remplissent les murs, les livres sont partout et seule une lucarne éclaire le tout, impeccablement rangé, à l'image d'Herbin qui se présentait au monde toujours bien mis.
Autoportrait, étude
1910
Huile sur carton
Pays-Bas, Otterlo, Kröller-Müller Museum Inv. KM 110.758
Cet autoportrait d'Herbin est le seul où il se représente coiffé d'une casquette, vêtu d'une veste de grosse laine, et non en complet veston. Cela est probablement dû à son arrivée au Bateau- Lavoir où les conditions climatiques étaient dures à supporter: glacière l'hiver, fournaise l'été. Les artistes qui le pouvaient - ce fut le cas d'Herbin-quittaient leur atelier au cœur de l'hiver et en plein été.
Nature morte
1912
Huile sur toile
Collection particulière
La Famille, femmes et enfants
1914
Huile sur toile
Achat, 1981
Paris, Musée d'Art moderne
Inv. AMVP 2169
Le tableau La famille, femmes et enfants combine construction abstraite et représentation figurative. Herbin unit fond et forme. Il n'existe quasiment plus de différence entre les deux. La composition devient un agglomérat de plans abstraits,
de couleurs et textures différents dans lesquels nous reconnaissons un visage ou un corps. Les formes géométriques sont présentes en nombre: carrés rouges, rectangles violets, parallélépipèdes verts ou autres. Elles dynamisent et ponctuent plastiquement la composition; elles sont un appel pour l'oeil et confèrent à l'oeuvre sa grande monumentalité.
Jardin devant une maison
1914
Huile sur toile
Collection particulière
Mobilisé en octobre 1914, Herbin ne réalise cette année-là que cinq tableaux dont La famille, femmes et enfants et ce très étonnant Jardin devant une maison. Sur ce tableau, dans lequel réapparaît un fond réaliste, semble flotter une sphère tourbillonnante composée de différents plans. Les parties abstraites sont peintes avec des camaïeux de bleu et de vert qui s'opposent au gris de la maison, seul élément réaliste.
Composition
1918
Huile sur toile
Collection particulière
Différentes Compositions, sans épithète accolé au nom, sont réalisées dans un esprit résolument non figuratif, non objectif. Nous sommes en 1918 et, parti du mouvement cubiste, Herbin est désormais un peintre abstrait. Son deuxième séjour à Céret, débuté la même année, favorise son développement et lui fait adopter de nouvelles règles de composition qui témoignent de sa richesse d'invention.
Composition cubiste
1918
Huile sur toile
Suisse, Collection particulière
Londres, Courtesy Connaught Brown
Nature morte aux feuilles
1917
Huile sur carton
Paris, Galerie Bérès
Dans cette composition, la dualité entre le fond et la forme est abolie, des formes géométriques sont peintes en aplat. Un grand rectangle vert pomme domine la composition et autour de celui- ci se déploient d'autres formes géométriques que viennent animer des éléments de réalité synthétisés - à l'instar de ces feuilles très stylisées que l'on pourrait presque qualifier de spitzoval, un terme qui n'existe qu'en allemand et désigne un ovale pointu. Le cubisme d'Herbin l'entraîne vers l'art abstrait.
Composition
1916
Huile sur toile
Suisse, Collection particulière Londres, Courtesy Connaught Brown
Composition
Janvier 1915
Huile sur toile
Suisse, Collection particulière
Londres, Courtesy Connaught Brown
En 1915, Herbin peint cinq tableaux dont cette composition aux couleurs chatoyantes.
À l'exception de deux ou trois éléments végétaux, la réalisation abstraite est composée de différents plans colorés s'enchevêtrant. Cette composition par plans colorés imbriqués les uns dans les autres sera très en vogue après 1945 chez des artistes abstraits tels que Jean Deyrolle ou Serge Poliakoff.
Composition circulaire
1918
Huile sur toile marouflée sur bois Collection particulière LC France
Cette composition montre une grande originalité qui ne rencontre aucun équivalent chez les autres artistes cubistes. Sa conception semble plutôt se rapprocher des rotoreliefs plus tardifs de Marcel Duchamp que des disques de Robert Delaunay. Si le format circulaire a pu être source d'inspiration pour Delaunay, cette ceuvre ne se limite pas à l'illustration de théories chromatiques mais se présente comme un tondo délibérément abstrait sans haut ni bas, ni droite ni gauche ; d'ailleurs Herbin signe son tableau au dos et au centre pour qu'il soit visible sous n'importe quel axe.
Du cubisme à l'art abstrait
En 1916, Herbin signe un contrat avec le marchand Léonce Rosenberg qui se veut le représentant des tendances les plus novatrices en art. Dans l'écurie Rosenberg, Herbin côtoie Le Corbusier, Léger, Gris, Gleizes, Metzinger, Severini, Picasso et beaucoup d'autres. Un deuxième et long séjour à Céret favorise son développement et lui fait adopter de nouvelles règles de composition qui témoignent de sa richesse d'invention. Partant du cubisme en 1908, en 1918 Herbin est devenu un peintre abstrait.
Au sortir de la guerre, les débats sur le renouveau du cubisme sont vifs. Herbin y participe et pense qu'il doit se diriger vers l'art monumental pour accompagner le développement de la société moderne. Il rejoint en cela les idées du mouvement De Stijl aux Pays-Bas ainsi que celles du Bauhaus en Allemagne et du Constructivisme en Russie.
Compositions 1, 2 et 3
1919
Huile sur toile
Paris, Courtesy Galerie Le Minotaure
Composition géométrique
Juillet 1920
Huile sur toile
Paris, Galerie Bérès
Silhouette sur plan,
Objet monumental numéro 2
1919
Huile sur toile marouflée, en relief sur fond en bois
peint
Collection particulière
LC France
Composition
1921
Fresque sur mortier
Paris, Collection Lahumière
En 1920, Herbin veut renouveler l'art monumental pour que l'art soit accessible à tous et investisse chaque domaine de la vie. Cette pensée nouvelle est contemporaine de la pensée de De Stijl
en Hollande, du constructivisme en Russie et plus tard du Bauhaus en Allemagne. Durant deux ans Herbin produit des objets monumentaux qui n'ont pas d'équivalent en France. Il s'agit là de reliefs, de peintures sur mortier, de fresques et de mobiliers. Il est soutenu dans cette démarche par son marchand Léonce Rosenberg et sa galerie L'Effort Moderne.
L'utopie des objets monumentaux
Pour mettre en conformité ses idées et son art, Herbin crée de 1918 à 1922 des reliefs, des peintures à fresques, des objets, des meubles qu'il nomme << objets monumentaux ». Pour Herbin, ces travaux sont réalisés en vue du renouvellement d'un art monumental. Ils sont conçus pour être intégrés à la ville moderne dans un esprit différent de celui de la peinture. Auguste Herbin est soutenu dans sa démarche par Léonce Rosenberg dont la galerie s'appelle L'Effort Moderne depuis 1918. Les objets monumentaux d'Herbin sont contemporains des recherches européennes les plus avancées, pourtant ils sont en France un échec commercial et critique. Herbin cesse leur production.
Auguste Herbin au Bateau-Lavoir
Arrivé à Paris en 1901, Herbin s'installe au Bateau-Lavoir en 1909, où il reprend l'atelier de Picasso. Le 13 rue Ravignan représente pour lui une << rare oasis dans la ville immense, abri miraculeux pour de nombreux artistes dans la misère >>. Cubiste dès 1908, Herbin va vivre au Bateau-Lavoir les plus grandes heures du cubisme. «La vie quotidienne au Bateau-Lavoir était agitée et pittoresque. Le cubisme a trouvé là le climat le plus propice à sa naissance »>, dira-t-il encore. Présenté par Apollinaire, André Salmon, Jacques Rivière et Frank Rutter comme l'un des acteurs directs du cubisme, Herbin intègre les collections des marchands promoteurs de la nouvelle peinture - Wilhelm Uhde, Clovis Sagot et Berthe Weill entre autres. À la veille de la Première Guerre mondiale, Herbin a déjà une carrière internationale. Au Bateau-Lavoir, où il reste jusqu'à 1927, le peintre noue des amitiés durables avec d'autres artistes, et notamment avec Otto Freundlich. La période montmartroise a un poids conséquent dans la carrière d'Herbin; elle couvre sa période cubiste, l'art monumental, la première abstraction, la nouvelle figuration, ainsi qu'une partie de la deuxième abstraction
Le Chemin du bon ange à Vaison-La-Romaine
1924
Huile sur toile
Paris, Courtesy Galerie Le Minotaure
Paysage méridional
1924
Huile sur toile
Donation de Henry-Thomas, 1984 Paris, Musée d'Art moderne Inv. AMVP 2620
Le retour à la figuration d'Herbin s'effectue sans contraintes mais sciemment: «Je dois rendre justice à Léonce Rosenberg, il ne m'a jamais forcé à faire quoi que ce soit qui ne soit pas convenable et qui ne soit pas en rapport avec mes idées, avec mon désir, avec mon développement et il n'a jamais fait pression sur moi pour obtenir quoi que ce soit». Le propos est clair et Le chemin du bon ange à Vaison-La-Romaine est un très bel exemple du réalisme magique propre aux tableaux figuratifs d'Herbin des années vingt.
Paysage méridional
1924
Huile sur toile
Donation de Henry-Thomas, 1984 Paris, Musée d'Art moderne Inv. AMVP 2620
Le retour à la figuration d'Herbin s'effectue sans contraintes mais sciemment: «Je dois rendre justice à Léonce Rosenberg, il ne m'a jamais forcé à faire quoi que ce soit qui ne soit pas convenable et qui ne soit pas en rapport avec mes idées, avec mon désir, avec mon développement et il n'a jamais fait pression sur moi pour obtenir quoi que ce soit». Le propos est clair et Le chemin du bon ange à Vaison-La-Romaine est un très bel exemple du réalisme magique propre aux tableaux figuratifs d'Herbin des années vingt.
Le Cap Canaille à Cassis
1923
Huile sur toile
Collection particulière
Les Gorges de la Loue
Non daté
Huile sur toile
Collection particulière
Le Réalisme magique
Les objets monumentaux suscitant l'incompréhension, Herbin cherche une nouvelle direction et, c'est avec un esprit radicalement différent et des idées nouvelles qu'il aborde la figuration. Ses tableaux figuratifs des années vingt répondent à une esthétique « construite >>. Les contours sont nets, précis, les formes et figures sont schématisées, la matière est anonyme et on y trouve peu d'effets illusionnistes. Il se dégage de ces tableaux une grande monumentalité. On peut inscrire ces œuvres dans l'esthétique puriste défendue par Amédée Ozenfant et Le Corbusier. Cependant, la poésie et le mystère qui les accompagnent donnent aussi raison au critique d'art Franz Roh, lequel avait classé Herbin parmi les peintres du Réalisme magique en 1925.
Nature morte à la nappe
1937
Huile sur toile Hélène Bailly
Nature morte aux poivrons,
choux rouges
1926
Huile sur toile
Achat à l'artiste, 1937
Centre national des arts plastiques, Inv. FNAC 14923 Dépôt au musée des Beaux-Arts, Orléans, Inv. D.95.2.22
Les Concombres
1926
Huile sur toile
Paris, Collection Lahumière
La puissance de la courbe
Au milieu des années vingt, les formes géométriques qui structuraient beaucoup des compositions de l'artiste tendent à disparaître au profit de courbes et de lignes ondulantes qui recouvrent peu à peu toute la surface de la toile. Auguste Herbin défend un art lisible par tous et se concentre sur l'essence et les moyens de la peinture. Peu à peu, la figure et l'objet disparaissent, seules importent désormais la couleur et la forme utilisées pour créer un maximum d'expressivité.
L'Homme oiseau II
1932
Huile sur toile
Paris, Collection Lahumière
Au début des années trente, les courbes remplacent peu à peu les formes de la géométrie plane et la figuration tend à disparaître. Le sujet de cette toile est inspiré par un fait divers tragique: l'accident d'un avion lors d'un spectacle aérien. Les spectacles aériens étaient alors très en vogue et ont fasciné beaucoup d'artistes dont Herbin, qui possédait un livre sur le pilote Louis Blériot, originaire comme lui du Cambrésis.
Le Port
1925
Huile sur toile
Paris, Collection Lahumière
Composition à la maison rouge
1925
Huile sur toile
Paris, Collection Lahumière
Les éléments forts de l'architecture, tels que les ponts, les viaducs et les arches, sont très présents dans la peinture d'Herbin. Ces constructions humaines structurent de nombreux paysages de l'artiste. Composition à la maison rouge représente le Moulin Chamberlin situé dans le village
de Saint-Benin à quelques kilomètres du Cateau- Cambrésis, sujet de nombreuses peintures.
Affiche de l'exposition
<< 1937. Exposition internationale des arts et techniques >>
organisée au Centre Pompidou
entre le 13 juin et le 20 août 1979
1979
Affiche
Paris, Musée de Montmartre
Mouvement alterné
Mouvement continu
1936
Aquarelle et mine de plomb sur papier Paris, Collection Lahumière
En 1937, Herbin réalise trois peintures monumentales de plus de 3 mètres, dont ces deux dessins représentent les esquisses. Mouvement alterné, Mouvement inversé et Mouvement continu décorent la salle de cinéma du pavillon
des chemins de fer et transports de l'Exposition universelle des arts et techniques. La salle
de cinéma accueillait également des œuvres de Pierre Hodé et de Georges Valmier. Ces peintures, propriétés du Mobilier national, sont en dépôt et exposées en permanence au Musée d'art de Cholet. L'une des trois compositions illustre l'affiche consacrée à l'exposition de 1937 par le Centre Pompidou.
Synchromie en jaune
1940
Huile sur toile
Collection particulière
LC France
En 1939, Herbin étudie la théorie des couleurs de Goethe (Die Farbenlehre), construite sur des rapports de polarité clair/obscur et sa palette s'en trouve modifiée: les contrastes se font plus vifs. Le rapport aux couleurs de Goethe fascine Herbin, tout comme Kandinsky avant lui, car le poète accordait aux couleurs un pouvoir physique, physiologique et psychique. Herbin réalise que la couleur suscite une plus grande expressivité lorsqu'elle est contenue dans une forme géométrique. C'est la raison pour laquelle en 1939, à partir de la série des Synchromies, les formes géométriques réapparaissent.
Composition
1935
Huile sur toile
Paris, Courtesy Galerie Le Minotaure
Composition sur fond blanc
1932
Huile sur toile
Paris, Collection Lahumière
Le chantre de l'abstraction circulaire
Herbin supprime l'objet figuré et réalise des abstractions où dominent courbes et volutes. Il pense alors que l'angle droit est le propre
de l'architecture. Selon lui, le rythme attaché à la courbe est universel. Elle représente le mouvement, crée le rythme, le dynamisme, et donc la vie. Herbin, chantre de l'abstraction circulaire - tel que le décrit l'historienne de l'art Gladys Fabre - participe tout comme Robert Delaunay et Fernand Léger à l'Exposition internationale des Arts et Techniques à Paris (1937). Il y expose un ensemble de trois peintures monumentales. Son abstraction évolue et, parallèlement, il organise la scène abstraite. Il est membre fondateur avec Jean Hélion et Georges Vantongerloo de l'association Abstraction-Création dont il est le principal animateur. À partir de 1939, il emploie à nouveau les formes géométriques.
Les contrastes de couleurs pures se font plus affirmés grâce à l'étude de la théorie des couleurs de Goethe.
Père et mère
1943
Huile sur toile
Paris, Collection particulière Paris, Applicat-Prazan
L'alphabet plastique permet à Herbin de se renouveler et d'exploiter plusieurs pistes. La première direction suivie par l'artiste est celle de la grille, un élément emblématique de l'histoire de l'art abstrait. Insérer les formes dans des carrés qui recouvrent toute la surface de l'œuvre a pour effet d'éliminer tout effet illusionniste (motif, sujet, perspective) afin d'obtenir ce qu'il appelle une «unité plastique ». Le rapport entre fond et forme S'équilibre. Cette façon de concevoir l'œuvre abstraite a eu beaucoup d'influence, notamment chez Victor Vasarely.
Homme et femme
1944
Huile sur toile
Paris, Collection Lahumière
L'alphabet plastique,
une synthèse absolue
De 1939 à 1942, dans l'isolement forcé de la guerre, Herbin, féru de littérature, de poésie et de philosophie, élabore un alphabet plastique. À l'instar des Correspondances de Baudelaire, des Voyelles de Rimbaud, de L'art de la Fugue de Bach, il crée un système de correspondances entre formes géométriques, lettres de l'alphabet, couleurs et notes de musique. L'alphabet plastique lui permet de se renouveler et de trouver l'unité parfaite entre forme et couleur. Cette méthode sera déterminante pour le renouveau de l'art abstrait géométrique après 1945. Son engagement au Salon des Réalités Nouvelles de 1946 à 1955, la publication de son traité L'art non-figuratif non-objectif en 1949, ses talents de pédagogue, sa vie de recherche, son goût pour l'absolu, font d'Herbin un modèle et une figure tutélaire de l'art abstrait pour toute une génération qui, à partir de sa peinture, ouvre de nouvelles voies, notamment celles de l'art cinétique et de l'art optique. L'histoire de l'art moderne n'a pas fini de prendre la mesure de son importance.
Lune
1945
Huile sur toile
Paris, Collection Lahumière
Parfum n°2
1954
Huile sur toile
Paris, Collection Lahumière
Dieu
1957
Huile sur toile
Collection particulière
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