samedi 13 mai 2023

Sarah Bernhardt au Petit-Palais en mai 2023


Un parcours intéressant pour cette commémoration dont voici l'essentiel :

SARAH BERNHARDT
(1844-1923)
Et la femme créa la star
Sarah Bernhardt, la grande Sarah, la Divine, ne cesse de fasciner aujourd'hui encore. Disparue, il y a tout juste cent ans, le 26 mars 1923, elle reste la plus célèbre actrice du théâtre français de son époque. Et quelle façon elle a d'être légendaire et moderne, s'exclamait, admiratif, son ami l'écrivain Edmond Rostand. Rassemblant près de quatre cents oeuvres, l'exposition du Petit Palais retrace la vie et la carrière de Sarah Bernhardt, depuis ses années de jeunesse dans le Paris du Second Empire jusqu'à sa gloire internationale dans les années 1920. Le parcours invite le visiteur à suivre les pas de celle qui fut une femme libre, excentrique, une citoyenne engagée et une actrice virtuose, célébrée par tous ses contemporains, de Victor Hugo à Marcel Proust, Jean Cocteau inventa pour elle l'expression monstre sacré. L'exposition évoque les riles emblématiques de son large répertoire (Phèdre, La Tosca La Dame aux camélias..), mais elle met également en lumière certains aspects moins connus de la personnalité d'une artiste aux multiples talents, à la fois peintre, sculptrice, écrivaine et metteuse en scène. Par-delà le mythe Sarah Bernhardt, édifié par Nadar, Georges Clairin, Louise Abbéma, Alfons Macha et tant d'autres, il s'agit donc de redécouvrir une femme hors du commun, au caractère bien trempé, qui semble avoir ignoré, sa vie durant, les frontières et les limites, et parvint à s'imposer comme la première star de Histoire


Une journée avec Sarah Bernhardt
Un cab s'arrête devant une porte; une femme, dans de grosses fourrures, descend vite; traverse la foule, qu'amassa le seul grelot de son attelage, en lui laissant un sourire; monte légèrement un escalier en colimaçon; envahit une loge fleurie et surchauffée; lance d'un côté son petit sac enrubanné dans lequel il y a de tout, et de l'autre son chapeau d'ailes d'oiseau; mincit brusquement de la disparition de ses zibelines; n'est plus qu'un fourreau de soie blanche; se précipite sur une scène obscure; anime de son arrivée tout un peuple pâle qui bâillait, là, dans l'ombre; va, vient, enfièvre tout ce qu'elle frôle; prend place au guignol, met en scène, indique des gestes, des intonations; se dresse, veut qu'on reprenne, rugit de rage, se rassied, sourit, boit du thé; commence à répéter elle-même; fait pleurer, en répétant, les vieux comédiens dont les têtes charmées sortent de derrière les portants; revient à sa loge où l'attendent des décorateurs; démolit à coups de ciseaux leurs maquettes, pour les reconstruire; n'en peut plus, s'essuie le front d'une dentelle, va s'évanouir; s'élance tout d'un coup au cinquième étage du théâtre, apparaît au costumier effaré, fouille dans les coffres d'étoffes, compose des costumes, drape, chiffonne; redescend dans sa loge pour apprendre aux femmes de la figuration comment il faut se coiffer; donne une audition en faisant des bouquets; se fait lire cent lettres, s'attendrit à des demandes... ouvre souvent le petit sac tintant où il y a de tout; confère avec un perruquier anglais; retourne sur la scène pour régler l'éclairage d'un décor, injurie les appareils, met l'électricien sur les dents; se souvient, en voyant passer un accessoiriste, d'une faute qu'il commit la veille, et le foudroie de son indignation; rentre dans sa loge pour dîner; s'attable, magnifiquement blême de fatigue, en faisant des projets; mange, avec des rires bohémiens; n'a pas le temps de finir; s'habille pour la représentation du soir, pendant qu'à travers un rideau le régisseur lui raconte des choses; joue éperdûment (sic); traite mille affaires pendant les entr'actes; reste au théâtre, le spectacle terminé, pour prendre des décisions jusqu'à trois heures du matin; ne se résigne à partir qu'en voyant tout le personnel dormir respectueusement debout; remonte dans son cab; s'étire dans ses fourrures en pensant à la volupté de s'étendre, de se reposer enfin; pouffe de rire en se rappelant qu'on l'attend chez elle pour lui lire une pièce en cinq actes; rentre, écoute la pièce, s'emballe, pleure, la reçoit, ne peut plus dormir, en profite pour étudier un rôle...
Et voilà, mon ami, ce qui me paraît plus extraordinaire que tout. Voilà la Sarah que j'ai connue. Je n'ai pas connu l'autre, celle des cercueils et des alligators. Je n'ai pas connu d'autre Sarah que celle-là. C'est la Sarah qui travaille. C'est la plus grande.
Edmond Rostand,
Extrait de la préface de l'ouvrage de Jules Huret, Sarah Bernhardt, 1899


MADEMOISELLE REVOLTE A LA COMEDE-FRANÇAISE
Le succès remporté en 1872 par Sarah Bernhardt dans la pièce Ruy Blas de Victor Hugo est tel que l'administrateur de la Comédie-Française lui propose de la réengager. L'actrice accepte de réintégrer la prestigieuse maison de Molière. Surnommée «< Mademoiselle Révolte », elle se fait connaître autant pour son talent de comédienne que pour ses frasques, dont toute la presse parle. Sarah Bernhardt est nommée sociétaire en 1875: sa célébrité ne fait que croître, mais l'actrice n'est pourtant pas satisfaite des rôles qui lui sont attribués. Elle se juge sous-employée et s'ennuie. En 1880, au retour d'une tournée triomphale de la troupe à Londres, Sarah Bernhardt subit un cuisant échec dans L'Aventurière d'Émile Augier, une pièce médiocre qu'elle ne voulait pas interpréter. Elle décide alors de quitter l'institution avec éclat et envoie une copie à la presse de sa lettre de démission. «C'est mon premier échec à la Comédie-Française. Ce sera le dernier », écrit-elle


Philippe Parrot (1831-1894)
Sarah Bernhardt dans Le Sphinx d'Octave Feuillet
1875
Huile sur toile Paris, collections Comédie-Française
Sarah Bernhardt est ici représentée dans le rôle de Berthe de Savigny dans Le Sphinx d'Octave Feuillet, qu'elle joue à la Comédie-Française en 1874. Le tableau est exposé sous le titre Portrait de Mme Sarah Bernhardt, pensionnaire du Théâtre-Français au Salon de 1875. Ses portraits avaient commencé à fleurir au Salon, temps fort de l'art contemporain à Paris, à partir de 1870.

Joseph-Albert Ponsin (1842-1899)
Sarah Bernhardt dans Le Passant de François Coppée
Vers 1875
Verre et métal Paris, Musée Carnavalet Histoire de Paris
Ce vitrail initialement placé dans l'hôtel parisien de la célèbre comédienne, rue Fortuny, immortalise Sarah Bernhardt en travesti dans l'un de ses premiers grands rôles, celui de Zanetto, le troubadour de la pièce de François Coppée Le Passant (1869). Ponsin avait également réalisé pour cette demeure un second vitrail représentant cette fois l'actrice dans le rôle de la reine dans Ruy Blas de Victor Hugo (collection particulière).

Louis Welden Hawkins (1849-1910)
Portrait de Robert de Montesquiou en Zanetto, dans Le Passant de François Coppée
Vers 1879 Huile sur toile Collection particulière
Le comte Robert de Montesquiou, écrivain et poète, était un ami de Sarah Bernhardt. Il est ici représenté en 1879 dans le costume de Zanetto, le jeune troubadour du Passant de François Coppée, rôle qui avait révélé Sarah Bernhardt au Théâtre de l'Odéon dix ans plus tôt. Un des albums photographiques personnels du comte de Montesquiou les présente tous deux revêtus du même costume,

Achille Mélandri (1845-1905)
Sarah Bernhardt en Zanetto dans Le Passant de François Coppée
Vers 1869
Portrait-carte
Paris, Bibliothèque nationale de France, département des Arts du spectacle

Georges Clairin (1843-1919)
Sarah Bernhardt dans le rôle de doña Maria de Neubourg, dans Ruy Blas de Victor Hugo
1879
Huile sur toile
Paris, collections Comédie-Française
En avril 1879, Sarah Bernhardt reprend le rôle de la reine à la Comédie-Française, sept ans après son triomphe à l'Odéon. Le peintre Georges Clairin, amant puis ami fidèle de Sarah Bernhardt, représente ici l'actrice dans la mise en scène de 1879, vêtue d'une robe à tournure et à col montant, qui met parfaitement en valeur sa silhouette gracile. Une petite couronne rehausse sa chevelure bouclée : elle rappelle le « petit diadème en dentelle d'argent » qui avait émerveillé Théodore de Banville en 1872.

Anonyme
Sarah Bernhardt dans le rôle de doña Maria de Neubourg, dans Ruy Blas de Victor Hugo
Vers 1872
Épreuve au gélatino-bromure d'argent Paris, Musée Carnavalet - Histoire de Paris

André Slom (1844-1909)
Le Dîner d'Hernani
1893-1895
Lavis d'encre et gouache papier sur Maisons de Victor Hugo, Paris/Guernesey

Anonyme
Corset porté par Sarah Bernhardt dans Hernani de Victor Hugo
Châle porté par Sarah Bernhardt dans Hernani de Victor Hugo
1877 Tulle blanc bordé de dentelles Paris, Bibliothèque nationale de France, département des Arts du spectacle

Paul Nadar (1856-1939)
Mounet-Sully dans le rôle d'Hernani dans la pièce de Victor Hugo
21 novembre 1877
Épreuve sur papier albuminé Maisons de Victor Hugo, Paris/Guernesey

Paul Nadar (1856-1939)
Sarah Bernhardt dans Hernani de Victor Hugo
Entre 1924 et 1939, d'après une prise de vue vers 1877 Épreuve argentique Paris, Bibliothèque nationale de France, département des Estampes et de la Photographie

André Gill (1840-1885)
Sarah Bernhardt en chimère
Vers 1880
Huile sur panneau de bois
Couilly-Pont-aux-Dames, Musée des Artistes - MNA Taylor

UNE ARTISTE PARMI LES ARTISTES
Dans le courant des années 1870, Sarah Bernhardt vit entourée d'artistes, tels les peintres Alfred Stevens, Gustave Doré ou Jules Bastien-Lepage. Rencontrés au début des années 1870, Georges Clairin et Louise Abbéma occupent une place à part dans ce cercle d'artistes. Tous deux, épris et fascinés par Sarah Bernhardt, s'attachent à représenter l'actrice aussi bien sur scène que dans son intimité. Au Salon de 1876, ils exposent chacun un portrait de Sarah : Abbéma la peint en tenue de ville, tandis que Clairin la montre chez elle, dans un somptueux déshabillé blanc qui met en valeur sa silhouette souple et sinueuse. Très remarqué au Salon, ce grand portrait, fleuron de la collection du Petit Palais, est l'un des plus célèbres de l'actrice. Influencée par ses amis, Sarah Bernhardt se met elle-même à peindre et à sculpter. Elle fait preuve de réels talents de sculptrice et expose régulièrement au Salon. Elle réalise aussi de nombreux portraits. L'actrice aime mettre en scène ses sculptures et n'hésite pas à se faire construire un spectaculaire atelier-salon où le Tout-Paris peut venir admirer ses créations.

VERS 1869
Sur les conseils du sculpteur Mathieu-Meusnier, Sarah Bernhardt apprend à sculpter.
1874
Sarah Bernhardt expose son premier portrait sculpté au Salon. Elle entame une liaison avec l'artiste Gustave Doré.
1876
Au Salon, Sarah Bernhardt expose un grand groupe sculpté, Après la tempête. En parallèle, ses amis les peintres Louise Abbéma et Georges Clairin présentent chacun un portrait de l'actrice.
1889
Sarah Bernhardt réalise un émouvant portrait funéraire de son époux, Jacques Damala.

Georges Rochegrosse (1859-1938)
Japonaise dans l'atelier (portrait présumé de Sarah Bernhardt)
Vers 1880
Huile sur toile Paris, Petit Palais, musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris
Georges Rochegrosse représente ici un modèle posant dans son atelier peuplé d'objets qui témoignent de la vogue du japonisme dans les années 1870-1880: kimono, éventail, grue japonaise... Le jeune modèle, à la chevelure rousse et au corps gracile, pourrait être Sarah Bernhardt, elle-même amatrice d'art japonais et dont Rochegrosse réalisa plusieurs portraits.

Attribué à Sarah Bernhardt (1844-1923)
Autoportrait
S. d.
Huile sur toile Collection particulière

Sarah Bernhardt (1844-1923)
Le Fou et la Mort
1877
Paris, Petit Palais, musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris
Cette sculpture s'inspire du héros du Roi s'amuse de Victor Hugo. Triboulet, bouffon à la cour de François Ier, ne parvient pas à empêcher le roi de séduire sa fille. Il tente d'assassiner le monarque, mais c'est finalement sa propre fille que le bouffon tue au terme d'un tragique quiproquo. Sarah Bernhardt le représente hagard, tenant un crâne et semblant méditer sur la vanité de l'existence et l'horreur de la mort. La sculpture est un hommage manifeste à Victor Hugo au moment où Sarah Bernhardt triomphe dans sa pièce Hernani.

Sarah Bernhardt (1844-1923)
Portrait de femme
1878
Paris, Musée Carnavalet - Histoire de Paris

Sarah Bernhardt (1844-1923)
Émile de Girardin
1878 Bronze et marbre vert Paris, Musée de la Vie romantique
Émile de Girardin (1802-1881) était un
journaliste et un homme d'affaires extrêmement influent. Il faisait partie du cercle d'admirateurs de Sarah Bernhardt, qu'elle appelait non sans ironie sa «ménagerie». L'actrice expose ce portrait au Salon en 1878 : elle parvient à rendre avec sensibilité la physionomie de Girardin, un homme arrivé et sûr de lui. Le buste, qui fut édité à plusieurs exemplaires, est l'un des portraits les plus diffusés de Sarah Bernhardt, sans doute en raison de la célébrité du modèle.

Sarah Bernhardt (1844-1923)
Portrait de fillette
Paris, Musée Carnavalet - Histoire de Paris

Sarah Bernhardt (1844-1923)
Nature morte aux pêches
1922
Huile sur carton
Paris, Musée Carnavalet Histoire de Paris

Sarah Bernhardt (1844-1923)
Autoportrait en Arlequin
Vers 1910 Huile sur toile
Toulouse, Fondation Bemberg

Sarah Bernhardt (1844-1923)
Georges Clairin
Vers 1875
Buste en plâtre patiné Paris, Petit Palais, musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris

Sarah Bernhardt (1844-1923)
Victorien Sardou
Paris, Petit Palais, musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris
Le portrait du dramaturge Victorien Sardou date de 1900: il s'agit de l'un des derniers portraits réalisés par Sarah Bernhardt, avec le buste d'Edmond Rostand, qui n'est plus localisé aujourd'hui. Un grand parchemin forme comme un plastron sur lequel sont inscrits en lettres capitales les titres des pièces à succès écrites pour Sarah par Sardou : Fédora, Théodora, La Tosca, Gismonda.

Georges Clairin (1843-1919)
Portrait de Sarah Bernhardt
1876 Huile sur toile Paris, Petit Palais, musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris
Clairin expose au Salon de 1876 ce grand portrait de Sarah Bernhardt, qui y est très remarqué. L'actrice, nonchalamment étendue sur un divan, un lévrier à ses pieds, est représentée dans l'atelier-salon de son hôtel particulier, dont le décor somptueux se reconnaît aisément. Elle est vêtue d'un luxueux déshabillé blanc, et sa pose sinueuse met en valeur sa silhouette gracile. Il s'agit de l'un des portraits préférés de Sarah Bernhardt, le premier la représentant en star. Elle le conserva toute sa vie. En 1923, peu de temps après la mort de l'actrice, il est donné par son fils au Petit Palais.

Louise Abbéma (1853-1927)
Sarah Bernhardt
S. d. Huile sur toile
Strasbourg, Musée des Beaux-Arts

Georges Clairin (1843-1919)
Sarah Bernhardt
Vers 1876-1880
Huile sur toile
Tourcoing, MUba Eugène Leroy

Louise Abbéma (1853-1927)
Le Déjeuner dans la serre
1877
Huile sur toile
Pau,  Musée des Beaux-Arts
Ce tableau s'inspire probablement du jardin d'hiver de l'hôtel particulier que Sarah Bernhardt s'était fait construire en 1875 rue Fortuny, dans le quartier à la mode de la Plaine Monceau. La jeune femme rousse à droite, dans sa longue robe blanche bordée de fourrure, pourrait être Sarah Bernhardt, saisie dans un rare moment d'intimité, tandis que derrière elle on distingue le profil sévère de Louise Abbéma, qui s'est autoreprésentée.

Louise Abbéma (1853-1927)
Sarah Bernhardt et Louise Abbéma sur le lac au bois de Boulogne
1883
Huile sur toile
Paris, collections Comédie-Française
Louise Abbéma rencontre Sarah Bernhardt au début des années 1870, alors qu'elle entame sa carrière de peintre. Elle tombe immédiatement sous le charme de Sarah : c'est probablement le début d'une relation amoureuse avec l'actrice, dont Louise Abbéma restera l'amie intime sa vie durant. Ce grand tableau, qui montre les deux femmes lors d'un rare moment de détente, au cours d'une promenade en barque au bois de Boulogne, rend un discret hommage à leur liaison.

Anonyme
Sarah Bernhardt et Georges Clairin
Vers 1890
Portrait-carte
Paris, Bibliothèque nationale de France, département des Arts du spectacle

Louise Abbéma (1853-1927)
Sarah Bernhardt
1875
Médaillon uniface en bronze
 Paris, Musée d'Orsay

Tableaux vivants dans l'atelier de Sarah Bernhardt, avenue de Villiers: Sarah Bernhardt, Louise Abbéma, madame Guérard et Georges Clairin
1875
Portrait-carte Collection Klervi Le Collen/D. Dubois/Sirot-Angel
Au milieu des années 1870, Louise Abbéma, Clairin et Sarah forment un trio inséparable surnommé la «Société du Doigt dans l'Eil», reprenant le titre d'un vaudeville de Clairville, Siraudin et Moreau joué pour la première fois en 1850. Cette Société d'autosatisfaction et «d'admiration mutuelle» a pour devise << Modeste pour autrui mais pour nous-mêmes orgueil >>

Anonyme
Tableaux vivants dans l'atelier de Sarah Bernhardt, avenue de Villiers:
Louise Abbéma en pacha et Sarah Bernhardt en odalisque
1875
Portrait-carte
Paris, Bibliothèque nationale de France, département des Arts du spectacle

Anonyme
Tableaux vivants dans l'atelier de Sarah Bernhardt, avenue de Villiers: Sarah Bernhardt à genoux et, allongés devant elle, de gauche à droite, le vicomte Abbéma, père de Louise, Louise Abbéma, Henriette Abbéma, mère de Louise, et Georges Clairin
1875
Portrait-carte Collection Klervi Le Collen/D. Dubois/Sirot-Angel

Moloch (1849-1909)
"Ingrate patrie tu n'auras pas ses os", caricature de Sarah Bernhardt
S. d.
Lithographie en couleurs 
Paris, Bibliothèque nationale de France, département des Arts du spectacle

André Gill (1840-1885)
Sarah Bernhardt en Sphinx.
 Caricature publiée dans le journal La Lune rousse
1878
Lithographie, typographie, rehauts d'encre de couleur Paris, 
Musée Carnavalet - Histoire de Paris

Anonyme
Sarah Bernhardt posant à côté du modèle en plâtre, à grandeur, d'Après la tempête
Vers 1876
Épreuve argentique d'après un négatif sur verre Paris, Bibliothèque nationale de France, département des Arts du spectacle
Exposé en 1876, Après la tempête obtient une mention honorable. Dès lors, Sarah exposera chaque année au Salon jusqu'en 1897. Dans ses mémoires, elle raconte comment elle vendit son groupe à un original de Nice alors que, fuyant la foule, elle campait au cap Martin avec son fils.

Achille Mélandri (1845-1905)
Madame Sarah Bernhardt sculptrice à côté du buste de Louise Abbéma
Vers 1877 Woodburytype Paris, collection particulière

Achille Mélandri (1845-1905)
Madame Sarah Bernhardt peintre, travaillant à La Femme avec des palmes
Vers 1877
Épreuve sur papier albuminé Paris, Musée Carnavalet - Histoire de Paris
Sarah fait appel à Mélandri pour la photographier dans son atelier au 2 boulevard Clichy. Elle revêt non pas une blouse d'artiste, mais un costume de satin blanc qui évoque celui d'un pierrot. Le critique Albert Wolf lui reprocha ses multiples activités actrice, peintre et  sculptrice. Émile Zola prit sa défense par voie de presse sur un ton humoristique: "Qu'on fasse une loi tout de suite pour empêcher le cumul des talents! "

SARAH BERNHARDT INTIME
Tout au long de sa carrière, Sarah Bernhardt accorde un soin particulier au décor de ses demeures. Après avoir déménagé plusieurs fois dans Paris, elle se fait construire en 1875 un hôtel particulier rue Fortuny, dans le quartier à la mode de la Plaine Monceau. En 1885, l'actrice, criblée de dettes, doit vendre cet hôtel pour s'installer à quelques pas, boulevard Pereire, dans un autre hôtel, où elle reconstitue en partie le décor de la rue Fortuny. Ce décor est à l'image de sa personnalité: spectaculaire, bizarre et foisonnant. Sarah Bernhardt y mêle aussi bien des œuvres de ses amis artistes que des objets extra-occidentaux, récoltés lors de ses tournées en Amérique et en Australie. Ce décor fascine. Tout au long de sa carrière, écrivains, journalistes, et photographes en ont laissé de multiples descriptions. Afin d'en restituer l'atmosphère, sont rassemblées ici des œuvres - mais également des costumes et des objets personnels de l'actrice- qui permettent d'évoquer son éclectisme, très caractéristique du XIXe siècle.


Félix Tournachon,
 dit Nadar (1820-1910)
Sarah Bernhardt chez elle
Vers 1890
Épreuve sur papier albuminé
Paris, Petit Palais, musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris

Victor Graham Robertson
L'Actrice Sarah Bernhardt dans son salon 1889
Huile sur bois Collection particulière
Dans cette vue de l'intérieur de Sarah Bernhardt, on reconnaît son célèbre portrait par Clairin, qu'elle conserva jusqu'à sa mort

Anonyme
Collet porté par Sarah Bernhardt
Entre 1898 et 1900
Éventail plié
Feuille en taffetas de soie creme, paillettes argent. plumes blanches, monture et rivure en nacre, behere en metal argent, ruban crème
Paris, Palais Galliera, musee de la Mode de la Ville de Paris 
Vers 1905
Porte-monnaie en ivoire ayant appartenu à Sarah Bernhardt
Couilly-Pont-aux-Dames, Musée des Artistes - MNA Taylor
Ivoire, soie et argent

Louise Abbéma (1853-1927)
Sarah Bernhardt
1885
Pastel Paris, Petit Palais, musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris
Louise Abbéma livre, avec ce beau pastel, un séduisant portrait de Sarah Bernhardt dans son intimité. L'actrice est reconnaissable à sa fine silhouette et à ses cheveux roux, "mousseux", relevés en un chignon haut. Elle porte une élégante tenue de ville, bordée de fourrure, qui témoigne de son goût pour la mode et contraste par sa sobriété avec l'exubérance de ses costumes de scène. Elle est ici dépeinte en train de déguster des fraises, un mets qu'elle appréciait particulièrement. Le célèbre cuisinier Auguste Escoffier créera pour elle les fameuses "Fraises Sarah Bernhardt"

Edouard Lièvre (1828-1886)
Miroir sur pied de Sarah Bernhardt avec sa devise "Quand même »>
Bois de noyer et d'acajou, bronze doré et argenté, faïence Paris, Galerie Steinitz
Vers 1875
Ce spectaculaire miroir, dont le vocabulaire décoratif s'inspire librement de la Renaissance, faisait partie du mobilier de Sarah Bernhardt dans son hôtel de la rue Fortuny. Conçu par l'ébéniste Édouard Lièvre, il porte, sur l'écusson central, les initiales et la devise de l'actrice «Quand même ».

Anonyme
Tigre
Époque Edo (1603-1868), XVIII-XIXe siècles, Japon Bois laqué et doré, yeux incrustés Paris, Musée Cernuschi
Passionnée par les animaux, notamment les fauves, Sarah Bernhardt fait l'acquisition de ce tigre spectaculaire chez le marchand Siegfried Bing, célèbre promoteur du japonisme et de l'Art nouveau. Ce fauve décore l'hôtel particulier de l'actrice jusqu'en 1884, année où, à court d'argent, elle décide de le vendre au collectionneur Henri Cernuschi

LE GOÛT POUR L'ÉTRANGE
Les excentricités de Sarah Bernhardt, sa passion pour le macabre, ont largement contribué à sa célébrité. Ce goût pour le morbide lui vient sans doute de sa santé fragile: enfant et adolescente, elle a frôlé la mort à plusieurs reprises. Comme pour conjurer sa peur de mourir, l'actrice se fait photographier dans un cercueil et s'entoure d'un memento mori. L'écrivain Pierre Loti, qui entretint avec elle une brève liaison, se souvient avoir vu dans sa chambre le squelette d'un jeune homme mort d'amour surnommé Lazare... La passion de Sarah Bernhardt pour l'étrange s'étend aux animaux effrayants et fantastiques, tels les fauves et les chauves-souris, qui lui composent une singulière ménagerie. L'actrice partage ce goût avec les esthètes et les poètes du symbolisme, notamment Robert de Montesquiou, auteur du recueil Les Chauves-Souris et fervent admirateur de l'actrice.


Achille Mélandri (1845-1905)
Sarah Bernhardt dans son cercueil
1879
Épreuve sur carte de visite albuminée Paris, Ville de Paris, Bibliothèque Marguerite Durand
Dès sa diffusion, cette photographie fit couler beaucoup d'encre. L'origine de ce cercueil capitonné de satin blanc demeure mystérieuse. Cadeau d'un amant, offert par sa mère, acquis par Sarah pour s'habituer à l'idée de la mort? Il manifeste du caractère morbide de la comédienne. Quand elle installe sa soeur, alors très malade, chez elle rue de Rome, faute de place, Sarah lui cède son lit et dort dans la même chambre dans son petit cercueil. L'affaire s'ébruita, et Sarah tira parti de la situation en se faisant photographier par Mélandri. L'image connut un véritable succès auprès du public.

Otto Wegener, dit Otto (1849-1924)
Sarah Bernhardt au chapeau chauve-souris
1899 ou 1900
Portraits-cartes Paris, Bibliothèque nationale de France, departement des Arts du spectacle
Otto réalise plusieurs portraits de Sarah. Elle arbore ici un étonnant chapeau chauve-souris, qui évoque le recueil de poèmes Les Chauves-souris, que son grand ami le comte de Montesquiou avait publié en 1893. Cette année-là, elle récite quelques extraits de l'oeuvre lors d'une matinée poétique. L'ouvrage avait inspiré la création de nouveaux objets - papier à en-tête, épingles de cravate, vase de cristal - ainsi que la mode féminine.

Lalouette (?-?)
Paire de bougeoirs
S. d.
Bronze argente
 Collection Christophe de Mirambet

LES GRANDS RÔLES
Sarah Bernhardt a interprété, tout au long de sa carrière, des centaines de rôles, mais certains ont particulièrement marqué les esprits. Le répertoire de l'actrice comprend aussi bien Racine, Shakespeare que des écrivains du XIXe siècle, comme Victor Hugo et Alexandre Dumas fils, l'auteur de La Dame aux camélias, l'un des plus grands rôles de la Divine. Le dramaturge Victorien Sardou figure parmi ses auteurs préférés. Il lui écrit des pièces sur mesure, qui, pour certaines, telles Théodora et La Tosca, furent de véritables triomphes, associant à des reconstitutions historiques dignes des péplums du cinéma hollywoodien une intrigue à rebondissements et une fin souvent tragique. La Divine était particulièrement célèbre pour ses scènes d'agonie. Une sélection des rôles les plus emblématiques de Sarah Bernhardt est proposée dans cette galerie, afin d'évoquer, de La Tosca à Phèdre, l'art du théâtre tel que le concevait l'actrice : un art total conjuguant la magie du geste et de la voix à des mises en scène somptueuses et historicistes.
1880
Sarah Bernhardt joue pour la première fois aux États-Unis le rôle de Marguerite dans La Dame aux camélias d'Alexandre Dumas fils - pièce rebaptisée Camille par les Américains. 
1882
En décembre, elle crée à Paris Fédora, le premier drame écrit pour elle par Victorien Sardou - qui obtient un grand succès populaire. 
1883-1893
Elle se produit au Théâtre de la Porte Saint-Martin, où sont notamment représentées les pièces à succès écrites pour elle par Victorien Sardou, comme Théodora en 1884 et La Tosca en 1887.
1893
Elle reprend le rôle de Phèdre de Jean Racine. Son interprétation inspire Marcel Proust pour le personnage de la Berma dans À la recherche du temps perdu.
1893-1899
Sarah Bernhardt dirige le Théâtre de la Renaissance à Paris.
1899
Elle prend la direction de l'ancien Théâtre des Nations place du Châtelet, qu'elle rebaptise Théâtre Sarah-Bernhardt.
Alfons Mucha (1860-1939)
Gismonda
1894
Lithographie en couleurs Paris, Bibliothèque nationale de France, département des Arts du spectacle
À la fin de l'année 1894, le jeune Alfons Mucha, encore inconnu, reçoit la commande d'une affiche pour la pièce Gismonda de Victorien Sardou, où le rôle-titre est interprété par Sarah Bernhardt. L'affiche, placardée dans Paris le 1er janvier 1895, connaît un succès immédiat et rend Mucha célèbre. L'artiste devient l'un des favoris de Sarah Bernhardt et réalise au total six affiches monumentales la mettant en scène. Ces six affiches, rassemblées pour l'exposition, sont présentées dans cette galerie.

André Gill (1840-1885)
Esquisse pour un panorama du boulevard Montmartre animé des personnalités parisiennes contemporaines
Vers 1880 Huile sur toile
Paris, Musée Carnavalet - Histoire de Paris
Vers 1880, le peintre et caricaturiste André Gill imagine un panorama animé des personnalités parisiennes contemporaines, parmi lesquelles on peut reconnaître la maigre silhouette de Sarah Bernhardt devant l'omnibus à impériale, le critique de théâtre Francisque Sarcey avec sa barbe blanche, Léon Gambetta, Jacques Offenbach, ou encore Édouard Manet assis à une table de café. Miné par des difficultés financières et la maladie, Gill ne put mener à bien le projet.


LA DAME AUX CAMÉLIAS
La Dame aux camélias est une pièce de théâtre adaptée en 1852 du roman d'Alexandre Dumas fils, publié en 1848. Elle raconte l'amour malheureux d'un jeune homme, Armand Duval, pour une courtisane, Marguerite Gautier, qui meurt prématurément, atteinte de tuberculose. La pièce, rebaptisée Camille aux États-Unis, a inspiré l'opéra de Giuseppe Verdi La Traviata. Sarah Bernhardt créa le rôle à New York en novembre 1880 et ne cessa ensuite de le jouer dans le monde entier jusqu'à la fin de sa carrière. La Dame devint l'une des interprétations les plus mythiques de Sarah, qui influença durablement le jeu de nombreuses actrices

Alfons Mucha (1860-1939)
La Dame aux camélias
1896
Lithographie en couleurs Paris, Bibliothèque nationale de France, département des Arts du spectacle

Napoléon Sarony (1821-1896)
Sarah Bernhardt dans la scène finale de La Dame aux camélias
Vers 1880
Portrait-carte
Paris, collections Comédie-Française
La Dame aux camélias est la pièce fétiche de Sarah, la pièce terre-neuve, celle qui rencontre toujours et partout le succès lui permettant de retrouver une aisance financière. Pour tout le monde, Sarah est Marguerite, même si la pièce est rebaptisée Camille par son impresario Edward Jarrett, pour ne pas effaroucher le public puritain outre-Atlantique, effaçant ainsi du titre toute évocation du monde de la prostitution.

THÉODORA
Théodora, drame en cinq actes écrit par Victorien Sardou et représenté pour la première fois le 26 décembre 1884 au Théâtre de la Porte-Saint-Martin, marque la deuxième collaboration de Sarah Bernhardt avec le dramaturge - après Fédora en 1882. L'intrigue se situe à Byzance, sous le règne de Justinien (527-565). L'impératrice Théodora, ancienne courtisane, s'éprend d'Andréas, un républicain qui veut assassiner l'empereur. Le complot échoue, et, au terme d'un tragique quiproquo, Théodora empoisonne son amant, avant d'être étranglée sur ordre de Justinien. La pièce reçut un accueil triomphal à sa création : la mise en scène somptueuse, avec des décors et des costumes spectaculaires, inspirés des mosaïques de Ravenne, éblouit le public, tout comme l'intensité du jeu de Sarah Bernhardt.

Manuel Orazi (1860-1934) et Auguste François-Marie Gorguet (1862-1927)
Théodora. Théâtre de la Porte Saint-Martin, drame en cinq actes et huit tableaux
1894
Affiche, lithographie en couleurs Paris, Bibliothèque nationale de France, département des Estampes et de la Photographie

«Je ne peux rien dire de bon sur la pièce elle-même... Mais comme cette Sarah joue! Après les premiers mots de sa voix vibrante et belle, j'ai eu le sentiment que je la connaissais depuis des années. Rien de ce qu'elle aurait pu dire ne m'aurait surpris; je croyais immédiatement la moindre de ses paroles... [...] il est incroyable de voir quelles attitudes elle est capable de prendre et comment chaque membre et chaque articulation joue avec elle. Un être étrange : il m'est facile d'imaginer qu'elle n'a nullement besoin d'être autre à la ville qu'à la scène. >>
Sigmund Freud,
Lettre à sa fiancée, Martha Bernays, 8 novembre 1885

Eugène Grasset (1845-1917)
Deux études de visages de femmes: portraits présumés de Sarah Bernhardt
1903
Mine de plomb Paris, Musée d'Orsay

Paul Nadar (1856-1939)
Sarah Bernhardt et Marie Laurent (1825-1904) dans Théodora
1884
Épreuve argentique contrecollée sur carton Paris, Musée d'Orsay
La première de Théodora eut lieu le 26 décembre 1884 au Théâtre de la Porte Saint-Martin. Sarah Bernhardt apparaît le plus souvent seule sur les photographies, mais il arrive qu'elle partage la scène avec ses partenaires, comme ici, Marie Laurent dans le rôle de Tamyris. Pour des questions techniques, le décor a été reconstitué dans l'atelier du photographe. La séance de pose relève plus du tableau vivant que de la photographie de scène.

Bridet (actif entre 1878 et 1886)
La voilà, Théodora, ah! Ah! Ah!
1er janvier 1885
Lithographie, typographie, rehauts d'encre de couleur
Paris, Musée Carnavalet - Histoire de Paris
Cette amusante caricature, qui représente le dramaturge Victorien Sardou portant Sarah Bernhardt telle une idole, fait référence à la musique de scène de la pièce Théodora, composée par Jules Massenet. Le couplet «La voilà, Théodora, ah! Ah! Ah!», chanté par les conjurés hostiles au pouvoir de Justinien, devint en effet très populaire.


LA TOSCA
La Tosca, un drame en cinq actes écrit pour Sarah Bernhardt par Victorien Sardou, représenté pour la première fois le 24 novembre 1887 à Paris au Théâtre de la Porte-Saint-Martin, se passe en 1800 à Rome : le peintre Mario Cavaradossi est arrêté par le préfet de police Scarpia pour avoir caché un proscrit. Scarpia convoite la maîtresse du peintre, la célèbre cantatrice Floria Tosca, et, quand celle-ci se présente à lui pour gagner la grâce de son amant, il tente d'obtenir ses faveurs. Tosca parvient à poignarder Scarpia, mais Mario est condamné à mort, et Tosca, désespérée, se jette dans le Tibre. Si la pièce de Sardou n'est plus guère jouée, en revanche, l'opéra de Giacomo Puccini, qui en est inspiré, nous restitue aujourd'hui l'intensité dramatique qui fit le succès de l'oeuvre originelle.

Alfons Mucha (1860-1939)
Tosca, drame en cinq actes et six tableaux de Mr Victorien Sardou. Théâtre Sarah-Bernhardt
1899
Lithographie en couleurs
Paris, Bibliothèque nationale de France, département des Estampes et de la Photographie

Jan Van Beers (1852-1927)
Sarah Bernhardt dans le rôle de la Tosca
1888
Huile sur bois
Bruxelles, Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique

Atelier Nadar (1855 à 1948)
Sarah Bernhardt dans le rôle de la Tosca
1887
Épreuve sur papier albuminé
Maisons de Victor Hugo, Paris/Guernesey

CLÉOPÂTRE
Cléopâtre est un drame en cinq actes écrit par Victorien Sardou et représenté pour la première fois au Théâtre de la Porte-Saint-Martin le 23 octobre 1890. Librement inspirée d'Antoine et Cléopâtre, de Shakespeare, la pièce raconte le destin tragique de la célèbre reine d'Égypte, dont les amours et le suicide demeurent légendaires. Si la qualité de l'intrigue fut contestée dès la création de la pièce, en revanche la mise en scène, dont le caractère spectaculaire n'a rien à envier au film Cléopâtre de Joseph L. Mankiewicz (1963), fut vivement applaudie et contribua largement au succès de ce drame. Sarah Bernhardt obtint un triomphe dans la scène finale - celle du suicide  par la morsure d'un aspic.

Louise Abbéma (1853-1927)
Sarah Bernhardt dans Cléopâtre
Vers 1890
Plume et lavis d'encre noire, rehauts de blanc sur papier Collection Christophe de Mirambet

Napoléon Sarony (1824-1896)
Sarah Bernhardt dans Cléopâtre
1891
Épreuve papier albuminé sur Paris, Musée d'Orsay

JEANNE D'ARC
La légende de Jeanne d'Arc connaît un regain d'intérêt tout au long du XIXe siècle. Ce vif engouement se manifeste alors que le patriotisme accuse le coup de la guerre franco-prussienne (1870-1871). Les auteurs, metteurs en scène et journalistes se saisissent également de cette héroïne unificatrice dans un climat social agité par l'affaire Dreyfus. Sarah Bernhardt interprète la Pucelle d'Orléans à deux reprises : en 1890 dans une pièce de Jules Barbier, puis en 1909, au Théâtre Sarah-Bernhardt, dans Le Procès de Jeanne d'Arc d'Émile Moreau. Ce rôle lui permet d'accéder au statut d'icône nationale.


Eugène Grasset (1845-1917)
Jeanne Darc (sic), Sarah Bernhardt
1889
Zincographie couleur Paris, Musée Carnavalet Histoire de Paris
En 1889, Sarah Bernhardt commande à Eugène Grasset, un célèbre dessinateur Art nouveau, une affiche pour assurer la promotion de sa nouvelle création, la Jeanne d'Arc de Jules Barbier. La première version de l'affiche, jugée trop réaliste, ne plaît pas à l'actrice, qui fait modifier son visage. L'exemplaire présenté ici est une version avant retouche: Sarah est reconnaissable à sa chevelure rousse et bouclée, qu'elle fit changer, la trouvant sans doute trop frivole pour le rôle.

Antoon Van Welie (1866-1956)
Sarah Bernhardt en Jeanne d'Arc
1911 Pastel
Paris, Galerie Elstir

Paul Nadar (1856-1939)
Sarah Bernhardt dans Jeanne d'Arc
1890
Épreuve argentique
Paris, Bibliothèque nationale de France, département des Estampes et de la Photographie

Paul Nadar (1856-1939)
Sarah Bernhardt dans Jeanne d'Arc
Vers 1890
Épreuve sur papier albuminé d'après un négatif sur verre, contrecollée sur carton
Paris, Bibliothèque nationale de France, département des Arts du spectacle

PHÈDRE
Sarah Bernhardt incarne Phèdre, personnage de la tragédie classique de Jean Racine, durant quarante ans, de 1874 à 1914. C'est l'un de ses plus grands succès, l'un des rôles qui lui sont le plus souvent réclamés, y compris lors de ses tournées. La pièce met en scène l'amour de Phèdre, femme de Thésée, pour Hippolyte, son beau-fils. Sarah Bernhardt joua à plusieurs reprises ce rôle face au célèbre comédien Mounet-Sully, qui fut un temps son amant. La tirade de Phèdre déclarant son amour à Hippolyte à l'acte II, scène 5, est l'un des passages les plus célèbres de la pièce. Il a été enregistré par Sarah Bernhardt chez Thomas Edison, lors d'une tournée de l'actrice en Amérique en 1903


Anonyme
Grand voile pour Phèdre
Vers 1894
Mousseline de soie grège avec application de marcassites dorées Collection Christophe de Mirambet

Paul Nadar (1856-1939)
Sarah Bernhardt dans Phèdre, entourée de trois actrices
1894
Épreuve argentique
Paris, Bibliothèque nationale de France, département des Estampes et de la Photographie

Mathurin Pêche
Sarah Bernhardt dans Phèdre
1903
Plâtre
Paris, Petit Palais, musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris, dépôt de la COARC
Le sculpteur représente ici Sarah Bernhardt à la fin de la tragédie de Jean Racine. Accablée et prête à mourir, elle prononce les vers célèbres : "Et la mort, à mes yeux dérobant la clarté, / Rend au jour qu'ils souillaient toute sa pureté."
Mathurin Pêche s'est inspiré d'une photographie de Sarah Bernhardt pour cette imposante effigie, extrêmement réaliste. Il a fidèlement reproduit le fauteuil, de style néo-grec, que l'actrice utilisait sur scène. Présentée au Salon de 1903, la sculpture est restée au Théâtre Sarah-Bernhardt, jusqu'à la fin des années 1960.

Georges Clairin (1843-1919)
Sarah Bernhardt
1902
Huile sur toile Paris, Musée d'Orsay

Louise Abbéma (1853-1927)
La Sorcière. Affiche pour le Théâtre Sarah-Bernhardt, imprimerie E. Bougard
1903
Chromolithographie Paris, Musée d'Orsay
La Sorcière fut l'un des derniers grands succès de Sarah Bernhardt dans une pièce de Victorien Sardou. Créée le 15 décembre 1903 au Théâtre Sarah-Bernhardt, la pièce se situe dans l'Espagne du XVIe siècle, en proie à l'Inquisition. Pour l'affiche du spectacle, Sarah Bernhardt sollicite d'abord Mucha, mais préfère finalement le projet de sa fidèle amie Louise Abbéma. Représentée en pied, Sarah Bernhardt porte une longue robe brodée, qui n'est pas sans rappeler certains costumes de Théodora.

Louise Abbéma (1853-1927)
Sarah Bernhardt dans le rôle d'Adrienne Lecouvreur
1880
Huile sur bois
Paris, Musée Carnavalet - Histoire de Paris
Le compositeur Reynaldo Hahn, ami de Sarah Bernhardt, laissa dans ses souvenirs ses impressions de Sarah Bernhardt incarnant l'actrice Adrienne Lecouvreur : << Mais, dès son entrée, au deuxième acte, dans son beau costume de Roxane, le manteau d'Orient sur les épaules, le turban et le voile au front, tenant à la main le petit exemplaire de Racine en maroquin, appliquée, attentive, calme et sérieuse, la voix posée, distincte, la diction claire, soigneuse, je vis qu'elle avait transformé son âme encore une fois, et que ce n'était plus Sarah, mais réellement Adrienne. >>

UN VASTE RÉPERTOIRE
Au cours de sa carrière, particulièrement longue, Sarah Bernhardt a joué plus de cent vingt pièces. Son répertoire comprenait aussi bien Racine et Shakespeare - elle fut une Lady Macbeth tout à fait saisissante, immortalisée par le photographe Paul Nadar - que des auteurs contemporains, souvent mélodramatiques et patriotiques. Les œuvres rassemblées ici témoignent, dans leur diversité, de la variété du registre de Sarah Bernhardt, capable d'incarner tout autant une héroïne antique (dans Médée de Catulle Mendès, 1898) ou biblique (dans La Samaritaine d'Edmond Rostand, 1897), qu'une actrice française du XVIIIe siècle (dans Adrienne Lecouvreur d'Eugène Scribe et Ernest Legouvé, 1849) ou une princesse russe parée de perles et de fourrures (dans Fédora de Victorien Sardou, 1882).

Alfons Mucha (1860-1939)
La Samaritaine
1897
Lithographie en couleurs
Paris, Bibliothèque nationale de France, département des Arts du spectacle

Walter Spindler (1878-1940)
Sarah Bernhardt
dans Fédora, acte III, Théâtre de la Renaissance
1894
Gouache, huile, pastel et encre Paris, Bibliothèque nationale de France, département des Arts du spectacle

Paul Nadar (1856-1939)
Sarah Bernhardt dans Macbeth
1884
Photographie positive montée sur carton Paris, Bibliothèque nationale de France, département des Estampes et de la Photographie
Sans qu'il ne jouisse d'aucune exclusivité, Paul Nadar, le fils de Félix, constituera, entre 1876 et 1894, un corpus d'images qui illustre la vie mondaine de Sarah et son répertoire au théâtre. Dans le rôle de Macbeth, il met l'accent sur l'expression du visage de la comédienne qui, dans L'Art du théâtre, rappelle que l'acteur "doit donner au public la réalité d'un être qui, pour lui, n'est que fiction. Il doit, avec ses propres yeux, verser les larmes de l'autre. Il doit, avec sa propre voix, hurler les douleurs de l'autre"

Georges Clairin (1843-1919)
Esquisse pour le portrait de Sarah Bernhardt (1844-1923), dans le rôle de Théroigne de Méricourt, drame
de Paul Hervieu, créé en 1903
1903
Huile sur toile
Orléans, Musée des Beaux-Arts

Alfons Mucha (1860-1939)
Médée
1898
Lithographie en couleurs
Couilly-Pont-aux-Dames, Musée des Artistes - MNA Taylor

LES ROLES EN TRAVESTI
Le travestissement est très fréquent au théâtre au XIXe siècle. On le retrouve dans tous les registres et le public en est friand. Sarah Bernhardt n'est pas la première ni la seule à incarner des rôles masculins - Virginie Déjazet était auparavant une grande spécialiste du genre à Paris. Pour Sarah Bernhardt, ces prestations comptent parmi ses plus célèbres. Elles jalonnent toute sa carrière, sur les planches mais aussi, plus tard, au cinéma, où elle est la première femme à jouer Hamlet. Dans son ouvrage L'Art du théâtre : la voix, le geste, la prononciation, l'actrice explique que ce choix de rôles masculins lui permettait d'interpréter des personnages plus intéressants que ceux traditionnellement dévolus aux actrices.

Alfons Mucha (1860-1939)
Lorenzaccio
1899
Lithographie en couleurs
Paris, Bibliothèque nationale de France, département des Arts du spectacle

Henri Manuel (1874-1947)
Sarah Bernhardt dans Lorenzaccio d'Alfred de Musset,
au Théâtre de la Renaissance
Vers 1895
Épreuve au gélatino-bromure d'argent Paris, Bibliothèque historique de la Ville de Paris, collections Roger-Viollet

Paul Nadar (1856-1939)
Sarah Bernhardt et Réjane dans Pierrot assassin
Vers 1878
Épreuve sur papier albuminé
Paris, Musée Carnavalet - Histoire de Paris
C'est le 28 avril 1883 que Sarah apparaît en Pierrot au Théâtre du Trocadéro avec Réjane en Colombine, dans la pièce de Richepin, Pierrot assassin. La pantomime macabre ne tient pas l'affiche très longtemps. C'est le cliché de Paul Nadar, photographe privilégié des théâtres parisiens, qui pérennise Sarah le visage enfariné dans ce rôle qui ne connut qu'un succès modéré. L'image inspirera le peintre et ami de Sarah, Giuseppe De Nittis.

Léandre
La Rampe ». Sarah Bernhardt en Hamlet, Revue des Théâtres
1899
Paris, collections Comédie-Française

Lafayette LTD (studio actif entre 1880 et 1962 à Dublin. Succursale à Londres à partir de 1897)
Sarah Bernhardt dans Hamlet de William Shakespeare
1899
Portraits-cartes
Paris, collections Comédie-Française
Sarah défraye à nouveau la chronique théâtrale quand elle apparaît en mai 1899 en Hamlet dans le théâtre qu'elle vient d'ouvrir place du Châtelet. Elle retrouve dans cette pièce, qui dure plus de quatre heures, un de ces rôles masculins qu'elle appréciait. Quelques mois plus tard, le public anglais sera lui aussi sensible à son interprétation.

Leonetto Cappiello (1875-1942)
Sarah Bernhardt dans Hamlet
1900
Mine de plomb, fusain, rehauts de pastel
et gouache blanche sur papier
Paris, Musée d'Orsay

Alfons Mucha (1860-1939)
La Tragique Histoire d'Hamlet
1899
Lithographie en couleurs
Paris, Bibliothèque nationale de France, département des Arts du spectacle

Louise Abbéma (1853-1927)
Sur la falaise
1893
Huile sur toile
Étampes, Musée intercommunal
Incarnation de la femme par excellence, Sarah Bernhardt inspira également Abbéma pour son décor du pavillon des femmes à l'Exposition universelle de 1893 à Chicago, dont seul le fragment où apparaît l'actrice subsiste encore.

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Alfons Mucha (1860-1939)
Publicité LU Lefèvre-Utile
1904
Lithographie en couleurs
Paris, Bibliothèque nationale de France, département des Estampes et de la Photographie

Jules Bastien-Lepage (1848-1884)
Portrait de Sarah Bernhardt, esquisse présentée à l'actrice
Vers 1879 Huile sur toile Collection particulière
Sarah Bernhardt aimait particulièrement ce portrait : elle prit la plume pour en faire l'éloge, louant la « symphonie de blanc éburnéen» réalisée par le peintre.
Est exposée ici l'esquisse que présenta Bastien-Lepage à l'actrice avant la commande du tableau.

Jules Bastien-Lepage (1848-1884)
Sarah Bernhardt
1879
Huile sur toile Collection particulière
Jules Bastien-Lepage, l'un des principaux représentants du naturalisme en peinture, se fait connaître au Salon dans les
années 1870 avec ses scènes de la vie paysanne. Mais l'artiste était également fasciné par le monde du théâtre.
Ce magnifique portrait, commencé en décembre 1878 et présenté au Salon l'année suivante, représente Sarah Bernhardt de profil, en tenue de ville. Elle observe presque amoureusement une petite statuette: il s'agit d'une étude, modelée par Bastien-Lepage pour préparer un tableau sur le thème d'Orphée

Gustave Moreau (1826-1898)
Salomé
Vers 1872 Huile sur toile
Paris, Musée Gustave-Moreau
Sarah Bernhardt a parfois été comparée aux héroïnes sensuelles et inquiétantes de Gustave Moreau. Dans la presse, l'écrivain Jean Lorrain écrit en 1887 : « Oui, elle est bien fille de Gustave Moreau, l'énigmatique Sarah, sœur des Muses porteuses de chefs décapités, d'Orphée et des Salomé sveltes et sanglantes, [...] dont elle portait d'ailleurs le triomphant et coruscant costume dans Théodora même, à l'acte de la loge impériale. »

Charles Adrien Prosper d'Épinay (1836-1914)
Portrait présumé de Sarah Bernhardt en Hermione
Vers 1903
Terre cuite sur piédestal en bois noirci Londres, Colnaghi
Sarah Bernhardt aimait tout particulièrement le rôle d'Hermione, l'héroïne en proie aux tourments de la jalousie dans la pièce Andromaque de Jean Racine. Elle le joua dès 1873 à la Comédie-Française, avant de le reprendre à la fin de l'année 1902 dans son propre théâtre. Cette splendide terre cuite est due à Prosper d'Epinay, un artiste cosmopolite, très apprécié des familles princières et qui réalisa plusieurs portraits de Sarah Bernhardt dès les années 1870.

Paul Nadar (1856-1939)
Sarah Bernhardt dans Izeyl
1894
Épreuve argentique
Paris, Bibliothèque nationale de France, département des Estampes et de la Photographie

Walter Spindler (1878-1940)
Sarah Bernhardt
1894
Pastel, crayon, sanguine, rehaussés de blanc et de noir sur toile Nice, Musée des beaux-arts Jules-Chéret

W. & D. Downey (studio actif à Londres des années 1860 aux années 1910)
Sarah Bernhardt
1902
Portraits-cartes
Paris, Bibliothèque nationale de France, département des Arts du spectacle
La maison W. & D. Downey, installée à Londres depuis 1872, obtient l'exclusivité des portraits de Sarah Bernhardt en Angleterre. Formidable opération publicitaire pour le photographe comme pour l'actrice, qui sera la première à exiger d'être payée avant de poser. Elle se montre parfois capricieuse, insistant pour garder une pose pourtant peu à son avantage, en refusant une autre plus photogénique, mais le vieux Downey professe pour elle << la profonde dévotion ».

Walter Spindler (1878-1940)
Sarah Bernhardt invoquant Diotima (Hommage à Sarah Bernhardt)
1908 Aquarelle
et crayon
Monaco, collection Robert Zehil

Alfons Mucha (1860-1939)
Sarah Bernhardt
1898
Fusain sur papier Collection particulière
La rencontre avec la Divine en 1894 lance la carrière du jeune Mucha : l'affiche pour Gismonda le rend célèbre, et le peintre obtient alors un contrat qui lui confère le statut de « directeur artistique » de Sarah Bernhardt. Mucha dessine pour elle des costumes, des bijoux, des documents promotionnels... Ce très beau portrait, plus intime, illustre l'amitié qui a uni les deux artistes. En témoignage de son admiration, Mucha y a apposé une mention éloquente: «A sa reine / son mauvais sujet ».

Henri-Marie-Raymond
de Toulouse-Lautrec (1864-1901)
À la Renaissance, Sarah Bernhardt dans Phèdre
Lithographie
Paris, Petit Palais, musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris

Henri-Marie-Raymond
de Toulouse-Lautrec (1864-1901)
Sarah Bernhardt dans Cléopâtre
Vers 1898 Lithographie
Paris, Petit Palais, musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris

Theobald Chartran (1849-1907)
Sarah Bernhardt dans le rôle de Gismonda
Après 1896
Huile sur cuir gaufré et doré Paris, Musée Carnavalet - Histoire de Paris
Gismonda, drame de Victorien Sardou, fut créée en 1894 au Théâtre de la Renaissance. Sarah Bernhardt y obtint un grand succès. Théobald Chartran présenta au Salon
de 1896 un portrait de l'actrice dans ce rôle, dont s'inspire ce tableau.

LE THÉÂTRE SARAH-BERNHARDT
Sarah Bernhardt fut une énergique femme d'affaires. Après avoir dirigé le Théâtre de la Renaissance de 1893 à 1899, elle prend la direction du vaste Théâtre des Nations (ancien Théâtre-Lyrique, construit par l'architecte Davioud en 1862), situé place du Châtelet à  Paris. Dès son arrivée, Sarah Bernhardt lui donne son nom et le hisse au rang des grandes scènes parisiennes. Elle repeint la belle salle à l'italienne d'un jaune «bouton d'or» inhabituel. Elle commande à Georges Clairin, Louise Abbéma, Louis Besnard et Alfons Mucha un nouveau décor pour le foyer. Infatigable, elle est tout à la fois meneuse de troupe, décoratrice, metteuse en scène, programmatrice. Ses spectacles grandioses sont largement financés par les recettes de ses tournées. Le lieu, entièrement repensé en 1967-1968, prend le nom de Théâtre de la Ville sous la direction de Jean Mercure.
1870
Lors de la guerre franco-prussienne, Sarah Bernhardt organise un hôpital militaire ambulant au Théâtre de l'Odéon.
1898
Pendant l'affaire Dreyfus, Sarah Bernhardt s'engage au côté des dreyfusards. Le 14 janvier 1898, elle envoie une lettre de soutien à Émile Zola, un jour après la parution de son célèbre article «J'accuse ».
1913
Elle joue devant des condamnés à mort
aux États-Unis et s'engage publiquement contre la peine de mort.
1914-1916
Alors qu'elle est amputée d'une jambe en 1915, elle participe au Théâtre aux Armées et va jouer sur le front. Elle se produit dans des pièces et des films patriotiques, comme Mères françaises de Louis Mercanton.
1916-1918
Lors de sa dernière tournée américaine,
elle s'engage pour sensibiliser l'opinion publique et favoriser l'entrée en guerre des États-Unis aux côtés des Alliés.

Henri Manuel (1874-1947)
Sarah Bernhardt dans sa loge, lors de la représentation de la pièce Vitrail de René Fauchois
1921
Épreuve au gélatino-bromure d'argent
Paris, Bibliothèque historique de la Ville de Paris, collections Roger-Viollet
Maurice Rostand, fils d'Edmond Rostand, se souvient de sa première visite, alors enfant, dans cette loge qui << resta la même quand elle se transporta au Théâtre Sarah-Bernhardt ». « Je me suis retrouvé dans la fameuse loge [...] où la baignoire inutile est toujours débordante d'objets et de manuscrits. >>

Maurice-Louis Branger (1874-1950)
Sarah Bernhardt dans sa loge avec Paul Hervieu, auteur de la pièce Théroigne de Méricourt
1902
Épreuve au gélatino-bromure d'argent Paris, Bibliothèque historique de la Ville de Paris, collections Roger-Viollet

Anonyme
Sarah Bernhardt sur scène
Après 1900
Épreuve gélatino-argentique
Collection Klervi Le Collen/D. Dubois/Sirot-Angel

Alfons Mucha (1860-1939)
Affiche pour
La Princesse lointaine
1897
Lithographie en couleurs
Paris, Bibliothèque historique de la Ville de Paris

Auguste Gorguet (1862-1927)
La Princesse lointaine
1911
Huile sur toile
Cambo-les-Bains, Musée Edmond Rostand - Villa Armaga

Théobald Chartran (1849-1907)
Sarah Bernhardt dans L'Aiglon
Vers 1900
Huile sur toile
Cambo-les-Bains, Musée Edmond Rostand - Villa Arnaga

Paul Boyer (1861-1952), Henri Manuel (1874-1947), William Downey (1829-1915)
Sarah Bernhardt dans L'Aiglon et dans ses plus grands rôles
Après 1906
Épreuve argentique
Paris, Musée Carnavalet - Histoire de Paris
Les cartes postales apparaissent à la fin du XIXe siècle. Elles permettent de diffuser sous une forme peu coûteuse les portraits photographiques des célébrités. Ici, dix cartes, qui peuvent être vendues à l'unité, représentent dix rôles joués par Sarah. Leur assemblage reconstitue l'actrice interprétant l'Aiglon. Cette forme de portrait-puzzle était surtout utilisée pour des portraits historiques, comme ceux de Napoléon Bonaparte.

LE TRIOMPHE DE L'AIGLON
SARAH BERNHARDT ET EDMOND ROSTAND
Sarah Bernhardt et Edmond Rostand se rencontrent en 1894. Sincèrement conquise par le talent du jeune auteur, elle joue l'année suivante l'une de ses pièces, La Princesse lointaine, un drame qui lui vaut un beau succès au Théâtre de la Renaissance, puis La Samaritaine, créée pour elle en 1897, la même année que Cyrano de Bergerac. Sarah Bernhardt figure parmi les intimes de l'écrivain invités à séjourner à la Villa Arnaga de Cambo-les-Bains. Celle qu'il surnomme << la reine de l'attitude et la princesse des gestes » lui demande d'écrire un nouveau texte pour son tout nouveau théâtre. Ce sera L' Aiglon, le triomphe de 1900, dans la magnifique salle jaune "bouton d'or" du théâtre Sarah Bernhart". Elle y joue à 56 ans du fils de Napoléon qu'on appelle l'Aiglon . Celui-ci emigrant en Autriche avec sa mère après la chute de l'Empire, perd son titre de roi de Rome pour devenir duc de Reichstadt, ou pour ses partisans un Napoléon II qui ne régnera jamais. Le nombre de représentations dépasse le millier, suscitant un engouement pour moult produits dérivés.


LA FEMME ENGAGÉE
Toute sa vie, Sarah Bernhardt fut une citoyenne engagée dans les combats de son temps. En 1870, durant la guerre franco-prussienne, elle organise un hôpital militaire ambulant au Théâtre de l'Odéon. Au moment de l'affaire Dreyfus, elle se range aux côtés d'Émile Zola lorsqu'il fait paraître J'accuse. Durant la Première Guerre mondiale, l'actrice, amputée de la jambe droite en 1915, rejoint le « Théâtre aux Armées », avec d'autres vedettes théâtrales de l'époque qui se produisent sur le front pour soutenir le moral des soldats, alors dénommés «. En 1916, elle s'embarque pour dix-huit mois de tournée aux États-Unis, où elle cherche à sensibiliser l'opinion publique au sort de l'Europe. Au théâtre, elle joue des pièces patriotiques telles Les Cathédrales d'Eugène Morand ou sa propre pièce Du théâtre au champ d'honneur. Au cinéma, ses films reflètent aussi son engagement, comme dans Jeanne Doré (de Louis Mercanton d'après la pièce de Tristan Bernard, 1915), où elle joue le rôle de la mère d'un condamné à mort, ou encore dans Mères françaises (Louis Mercanton, 1917), qui a pour toile de fond la Grande Guerre

Georges-Antoine Rochegrosse (1859-1938)
Martyre d'une cathédrale, dit aussi Intérieur de cathédrale
1915
Huile sur toile
Reims, Musée des Beaux-Arts
Le 19 septembre 1914, les Allemands bombardent la cathédrale de Reims, où un gigantesque incendie se déclare. Rochegrosse représente une femme dans les décombres, probable référence à l'engagement de Sarah Bernhardt durant la guerre. Malgré son amputation en 1915, celle-ci joue en effet au Théâtre Sarah-Bernhardt Les Cathédrales d'Eugène Morand, entourée des allégories des principales cathédrales de France, devant un immense décor représentant celle de Reims enflammée,

Louise Abbéma (1853-1927)
Jeanne d'Arc sauvant la France (portrait présumé de Sarah Bernhardt)
1916
Huile sur toile
Collection particulière
Sarah Bernhardt a souvent incarné Jeanne d'Arc au théâtre. Ici, durant la Grande Guerre, Louise Abbéma la représente sous les traits de cette figure éminemment patriotique, en armure devant la cathédrale de Reims en flammes. Longtemps réputée perdue, cette peinture semble avoir été exposée dans l'église de la nécropole nationale de Notre-Dame-de-Lorette, à Ablain-Saint-Nazaire, qui réunit les dépouilles des soldats morts pour la France pendant les combats d'Artois et de Flandres de 1914 à 1918.

Société générale des cinématographes Éclipse
Madame d'Urbex, incarnée par Sarah Bernhardt, et un poilu devant la cathédrale de Reims
Photographie du tournage du film de René Hervil
et Louis Mercanton, Mères françaises
1917
Épreuve au gélatino-bromure d'argent
Paris, Bibliothèque historique de la Ville de Paris, collections Roger-Viollet
Devant la cathédrale de Reims protégée des bombardements, le personnage de Jeanne d'Urbex, incarné par Sarah Bernhardt, retrouve sa sainte patronne, personnifiée par une sculpture de Jeanne d'Arc, ainsi que le soldat qui va l'aider à rejoindre les lignes de front où se trouve son fils mourant. La scène a été tournée sur place durant le conflit.

DE LA SCÈNE A L'ECRAN
Sarah Bernhardt commence sa carrière au cinéma à presque cinquante-six ans, en participant au Phono-Cinéma-Théâtre de l'Exposition universelle de Paris en 1900. Elle tourne ensuite de manière discontinue durant
une vingtaine d'années jusqu'à son dernier long métrage, La Voyante (aujourd'hui disparu), filmé à la veille de sa mort. Ses œuvres cinématographiques sont projetées aux États-Unis, dans les Balkans, en Grèce, en Turquie, en Égypte, et dans bien d'autres pays. À l'époque, le cinéma muet ne peut rendre compte de la mythique << voix d'or » de l'actrice. Néanmoins, sa gestuelle très expressive, héritée du théâtre, reste l'une des caractéristiques de son jeu, proche d'un théâtre filmé. D'ailleurs, bon nombre de ses rôles au cinéma - où elle tient toujours le rôle principal - (Hamlet, La Tosca, La Dame aux camélias, Adrienne Lecouvreur...) furent initialement joués au théâtre. Louis Mercanton (1879-1932), son réalisateur fétiche, la dirige dans son plus grand succès, La Reine Élisabeth (1912), qui sort d'abord sur les écrans américains, sous l'influence d'Adolph Zukor, l'un des cofondateurs de la Paramount. Le triomphe du film permet de dégager d'énormes bénéfices, qui lancent le règne des grands studios américains. Jouant à être elle-même, Sarah Bernhardt apparaît aussi dans le documentaire tourné chez elle à Mercanton (1912), présenté dans par Belle-Île-en-Mer la salle suivante, ainsi que dans le film de Sacha Guitry Ceux de chez nous (1915). Les actualités filmées de l'époque immortaliseront ses funérailles, suivies par une foule immense d'admirateurs



BELLE-ÎLE-EN-ART
Sarah Bernhardt parcourt la Bretagne dès les années 1870, où elle effectue alors un voyage avec le peintre Gustave Doré. Mais ce n'est qu'en 1893 qu'elle découvre Belle-Île, cette île rocheuse située au sud de la Bretagne, dans le Morbihan. L'actrice est enthousiasmée par la beauté du lieu, avec ses paysages sauvages et ses côtes escarpées. En 1894, elle fait l'acquisition d'un fortin militaire désaffecté. Elle y entreprend d'importants travaux pour y édifier plusieurs pavillons, destinés à sa famille et à ses amis. Sarah Bernhardt se rend l'été à Belle-Île, pour des « vacances » en compagnie de son fils et de ses petites-filles, et d'invités triés sur le volet, tels le musicien Reynaldo Hahn ou les peintres Louise Abbéma et Georges Clairin. À Belle-Île, Sarah, toujours pleine d'énergie, pratique de multiples activités : la chasse, la pêche, mais également la lecture et la sculpture. Inspirée par la faune
et la flore marines, elle réalise d'étranges bronzes aux patines raffinées, moulés sur des algues et des poissons, qui sont présentés avec succès à l'Exposition universelle de 1900.
1894
Sarah Bernhardt achète le fort des Poulains à Belle-Île-en-Mer, en Bretagne, où elle lance de grands travaux d'aménagement. Elle s'y rend chaque été.
Elle présente à l'Exposition universelle des sculptures réalisées pendant ses séjours à Belle-Île-en-Mer et inspirées par les algues et les animaux marins.
1912
Louis Mercanton filme l'actrice pour son documentaire Sarah Bernhardt à Belle-Île ou Sarah Bernhardt at Home.
1924
La propriété de Sarah Bernhardt est vendue avec son contenu. Une partie est rasée pendant la Seconde Guerre mondiale. Le fortin est racheté par le Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres, et protégé au titre des Monuments historiques en 2000.

Vues d'ensemble de
Belle-Île-en-Mer (Morbihan)
1890-1915
Album contenant des épreuves sur papier albuminé Paris, Bibliothèque historique de la Ville de Paris, collections Roger-Viollet
Neurdein Frères
Vues d'ensemble de Belle-Île-en-Mer (Morbihan)
1890-1915
Album contenant des épreuves sur papier albuminé Paris, Bibliothèque historique de la Ville de Paris, collections Roger-Viollet
En 1894, Sarah achète à Belle-Île un fortin en ruines construit à la pointe des Poulains. Elle engloutit des sommes considérables pour aménager ce lieu inhabitable, où désormais elle passe tous ses étés et se repose entre deux tournées. La bâtisse n'offre pas un grand confort, mais on s'y amuse beaucoup : lecture, pêche, tennis... Pour loger tout son monde, plusieurs bâtiments sont construits : la villa dite « des cinq parties du monde », la villa Lysiane, la villa Clairin, un pavillon pour son atelier sans oublier une ferme.

Louise Abbéma
Sarah Bernhardt
1921
Huile sur toile
Paris, Musée d'Orsay, donation Rispal, 2005

Anonyme
Le château de Penhoët,
propriété de Sarah Bernhardt à Belle-Île-en-Mer
Vers 1920
Épreuve au gélatino-bromure d'argent
Paris, Bibliothèque historique de la Ville de Paris, collections Roger-Viollet
En 1909, Sarah Bernhardt acquiert près de son fortin le château de Penhoët, plus confortable.
En 1921, Sarah Bernhardt envisage de
se séparer de la propriété de Belle-Île, qui sera finalement revendue après sa mort, en 1924, Le château est détruit durant la Seconde Guerre mondiale.

W. & D. Downey (studio actif à Londres des années 1860 aux années 1910)
Sarah Bernhardt et sa petite-fille Simone
Vers 1898-1899
Portrait-carte
Paris, Bibliothèque nationale de France, département des Arts du spectacle

Anonyme
Sarah Bernhardt avec sa petite fille Simone, son fils Maurice et sa femme Terka
Vers 1892
Épreuve argentique
Collection Klervi Le Collen/D. Dubois/Sirot-Angel
En 1887, Maurice Bernhardt, le fils unique et adoré de Sarah Bernhardt, épouse en grande pompe Terka Jablonowska, une jeune fille noble d'origine polonaise. Douce et réservée, la jeune Terka accepte la relation exclusive qui unit Maurice Bernhardt à sa mère et prend sa place dans le cercle des intimes de l'actrice, Maurice et Terka auront deux filles, Simone et Lysiane Bernhardt.

Anonyme
Sarah Bernhardt et sa petite-fille Lysiane
Vers 1910
Épreuve au gélatino-bromure d'argent
Paris, Bibliothèque historique de la Ville de Paris, collections Roger-Viollet
Sarah Bernhardt était particulièrement attachée à ses deux petites-filles, Simone et Lysiane, nées respectivement en 1889 et 1896. Lysiane Bernhardt, très proche de sa grand-mère, qu'elle surnomme
<< Great », l'accompagnera dans ses dernières tournées aux États-Unis et lui consacrera
un ouvrage, publié en 1945 sous le titre Sarah Bernhardt, ma grand-mère.

Georges Clairin (1843-1919)
Sarah Bernhardt dans son jardin de Belle-Île-en-Mer
1919
Huile sur toile
Tours, Musée des Beaux-Arts


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