vendredi 5 mai 2023

Voyage vers l'intérieur d'Anna-Eva Bergman au MAM en mai 2023

Magnifique rétrospective de cette attachante artiste dont voici l'essentiel :


«La voie qui mène à l'art passe par la nature et l'attitude que nous avons envers elle.» ANNA-EVA BERGMAN, 1950

Anna-Eva Bergman (1909-1987) est une figure clé de la peinture de l'après-guerre. Elle a su inventer un langage pictural très singulier, basé sur un vocabulaire de formes simples inspiré par les paysages nordiques et méditerranéens. Bien que célébrée et exposée dans le monde entier de son vivant, son œuvre est aujourd'hui méconnue.

Cette première grande rétrospective apporte un éclairage décisif dans la redécouverte de cette artiste. Le parcours, chronologique, permettra d'apprécier la précocité de sa vocation, ses dons d'observatrice et de caricaturiste, qui ont fait d'elle une chroniqueuse alerte, témoin des bouleversements sociaux et politiques des années 1930. Ces œuvres graphiques, les premières qui ont été exposées, ne sauraient la réduire au statut d'illustratrice. Elles témoignent d'une puissante individualité, signe d'une émancipation précoce et d'une grande liberté d'esprit.

À l'orée des années 1950, elle confirme sa vocation de peintre à travers le choix d'une voie non figurative mais toujours symbolique. L'observation de la nature passe au premier plan, nourrie par une profonde introspection sur laquelle l'artiste va fonder sa propre théorie esthétique. Elle conçoit un alphabet formel qu'elle n'a de cesse de pratiquer au tournant de chaque décennie, jusqu'au développement d'un minimalisme solennel, en lien avec sa relation particulière au paysage, à la pureté radicale des couleurs et des formes.

L' exposition met en avant la richesse des techniques plastiques abordées par Bergman et l'usage très spécifique d'un matériau devenu sa signature: la feuille de métal.

Ce projet ambitieux qui rassemble plus de 300 œuvres, archives, documents visuels et audiovisuels, dont certains encore inédits, a été réalisé en étroite collaboration avec la Fondation Hartung-Bergman à Antibes et le Nasjonalmuseet à Oslo.


Anna-Eva Bergman réalisant une décoration murale au Stockholms Högskolas Student Forening [Union des étudiants de l'université de Stockholm], 1927, photographe non connu

Une jeunesse européenne
Anna-Eva Bergman incarne l'Europe du XXe siècle. Elle grandit en Norvège, où elle développe très vite une grande faculté d'observation; elle croque des saynètes avec un sens de l'humour tranchant, à la fois à l'écrit et par le dessin. Elle suit une formation artistique à Oslo qu'elle complète à Vienne en 1928. À Paris en 1929, elle rencontre Hans Hartung, jeune peintre abstrait alors inconnu. Elle l'épouse aussitôt en Allemagne et fréquente les cercles d'artistes engagés de Dresde.
En 1933-1934, Bergman vit comme un «paradis» son installation sur l'île de Minorque, aux Baléares, dans une maison qu'elle fait construire avec Hartung en bord de mer. Elle documentera et racontera longuement ce séjour dans un livre, Turid en Méditerranée, publié en 1942. Devenue allemande par son mariage, Bergman connaît plusieurs démêlés avec les autorités du Ille Reich et hait ce régime qu'elle brocardera dans une autobiographie non publiée écrite entre 1940 et 1945: Une bagatelle suédo-norvégienne. Elle signe à cette période des articles et des dessins pour la presse et séjourne, au gré des contraintes matérielles et des occasions, à Berlin, Oslo, Paris, puis en Italie, où, en 1937-1938, elle est bouleversée par les villages de Ligurie, les mosaïques byzantines et l'art de la Renaissance. Ce foisonnement d'expériences nourrit jusqu'à ses 30 ans un univers visuel vivant et drôle qui ne va pas tarder à gagner en gravité. Le traumatisme de la guerre, qu'elle passe dans une Norvège durement occupée, participe à cette évolution personnelle dans une Europe malmenée par la folie meurtrière des totalitarismes.

1909
Naissance à  Stockholm d'une mère norvégienne et d'un père suédois.
Ses parents se séparent peu après.
1928
Bergman est très influencée par l'enseignement d'Eugen Steinhof à l'École des arts appliqués de Vienne. 
1929
Passe deux mois à l'Académie d'André Lhote à Paris, qu'elle trouve ennuyeuse. Rencontre avec Hans Hartung 
1930-1936
Séjours avec Hartung sur la Côte d'Azur, à Dresde, Paris, Minorque et Berlin. Elle fournit des reportages illustrés pour la presse norvégienne.
1937 Rupture avec Hartung. Gravement malade, Bergman effectue
plusieurs séjours de convalescence sur la Riviera italienne.
En 1938, elle inscrit à la première page de son agenda: «Jeg vill» («Je veux!»).


[Non titré]
Vers 1927
Encre de Chine sur papier
Fondation Hartung-Bergman

[Non titré]
Vers 1927
Aquarelle sur papier 
Fondation Hartung-Bergman

Le mendiant à «La Colle», France, 1931
Huile sur panneau de bois contreplaqué
Fondation Hartung-Bergman

Fête d'Arendal, 1925
Mine de plomb sur papier
 Fondation Hartung-Bergman

[Non titré]
1931
Tempera sur toile
Fondation Hartung-Bergman

Non titré
Vers 1933 Huile sur toile
Fondation Hartung-Bergman
Ces vues d'habitations peintes à Minorque montrent l'intérêt précoce de Bergman pour les formes d'architecture vernaculaire qu'on trouve dans les carnets de ses débuts, et l'importance qu'elle accorde à la composition et au cadrage. En effet, ces tableaux dialoguent avec des photographies qu'elle a prises selon des points de vue identiques lors du même séjour. Le motif du mur blanc, typiquement méditerranéen, contraste fortement avec le ciel bleu sombre. Il était déjà présent dans une aquarelle réalisée à Saint-Paul-de-Vence en 1930. Il réapparaîtra dans les années 1960 comme un thème à part entière, en résonance avec les falaises des fjords norvégiens

Non titré
Vers 1933
Huile sur toile
Fondation Hartung-Bergman

St Paul Alpes Maritimes
1930
Aquarelle sur papier
 Fondation Hartung-Bergman

St. Jeannet
Vers 1930
Aquarelle sur papier
 Fondation Hartung-Bergman

Non titré
Vers 1932
Aquarelle sur papier
Fondation Hartung-Bergman

Anna-Eva Bergman et Hans Hartung à Leucate, 1929, photographe non connu Épreuve gélatino-argentique
Fondation Hartung-Bergman


Homborøya
1932
Aquarelle sur papier
Fondation Hartung-Bergman

Autoportrait
Vers 1946
Huile sur panneau de bois Isorel
Fondation Hartung-Bergman

Dresde 1930, marché
Mine de plomb papier sur
Fondation Hartung-Bergman
S
Il peint, je peins]
Vers 1940
Encre de Chine et aquarelle sur papier Fondation Hartung-Bergman

Les immigrés allemands, 1932]
1932
Aquarelle sur papier
 Fondation Hartung-Bergman

<< Ne va donc pas si vite, Lars!>>
Vers 1944
Encre de Chine et aquarelle sur papier
Fondation Hartung-Bergman

Fabrication d'enfants
Vers 1944
Encre de Chine sur papier
 Fondation Hartung-Bergman

Une famille pacifiste
Vers 1944
Encre de Chine sur papier
Fondation Hartung-Bergman

N°9 «La victoire est à nous !»
1945
Encre de Chine sur papier perforé
Fondation Hartung-Bergman

N°12 «La victoire est à nous!»
1945
Encre de Chine sur papier perforé Fondation Hartung-Bergman

Futur national-socialiste
Vers 1933 Encre de Chine sur papier Fondation Hartung-Bergman
Quatre véhicules de nature technologique très différente - une charrette, un avion, une voiture et une bicyclette - sont structurés par des croix gammées. Les roues, l'hélice, la calandre, la trace des pneus sur le sol: tout prend la forme du svastika choisi par Hitler pour symboliser la suprématie de la «race aryenne » et l'épuration de la société. Les passagers se meuvent tranquillement, comme inconscients de ce processus qu'ils sont en train de mettre en branle. Cette image est une efficace dénonciation du lavage de cerveau qu'opère alors l'idéologie nazie et sa propagande, jusqu'au cœur du quotidien.

El generalissimo
Vers 1935
Mine de plomb sur papier Fondation Hartung-Bergman
Ayant quitté l'Espagne depuis plusieurs années, Bergman reste attentive à l'évolution du fascisme dans ce pays miroir de son vécu de l'émergence du nazisme en Allemagne. Elle caricature Franco en chef d'état- major, dans ses débuts de dictateur, qui lui vaudront le titre de «généralissime». Elle le dessine bouffi et vulgaire, en train de se curer les dents, attablé devant un verre vide et quelques pesetas qu'il tripote avec le majeur. Elle procède à la dégradation du militaire, dont elle raille et réfute le pouvoir, opérant une relation grotesque entre le prestige de son grade, l'expression de son physique et la trivialité de la scène.


Anna-Eva Bergman dessinant à Citadelløya, 1949, photographie Rolf Skjethe

Fragments d'une île en Norvège
Anna-Eva Bergman est fascinée par les beautés géologiques de la nature. Elle porte une attention toute particulière aux pierres, aux galets, aux failles et aux entailles dans la roche, aux plissures et aux textures des minéraux. Lors des étés 1949, 1950 et 1951, elle se rend à Citadelløya, dans le sud de la Norvège. Ces séjours occasionnent un profond renouvellement de son vocabulaire artistique avec la série des Fragments d'une île en Norvège, véritable acte de naissance dans sa maturité de peintre. Il faut ajouter dans ce processus l'importance cruciale d'un voyage dans le nord du pays lors de l'été 1950, où elle fait l'expérience du soleil de minuit le long des îles Lofoten.
L'évolution de Bergman était en réalité en germe depuis 1946, date à laquelle elle décide de reprendre à zéro sa vocation et ses ambitions. Elle est très proche de Christian Lange, architecte spécialiste du gothique dont elle a épousé le fils en secondes noces. Elle partage avec lui ses nouvelles préoccupations esthétiques, philosophiques et mystiques auxquelles elle consacre études et lectures. Elle travaille sur le nombre d'or - loi géométrique fondée sur la notion de proportion qui inspire les artistes quant au rapport entre l'harmonie et la beauté depuis l'Antiquité -, sur la qualité rythmique de la ligne, sur la symbolique des couleurs. Elle lit aussi bien Kafka et Malraux que des ouvrages d'anthropologie. Elle réalise sa première peinture à la feuille d'or et obtient une commande importante de décor pour un hôtel à Larvik, dans le sud de la Norvège.

1939
Retour en Norvège et installation à Oslo.
1941-1945
Bergman reprend ses recherches de jeunesse sur la Section d'or. Elle réalise des dessins antinazis et sur l'occupation allemande en Norvège.
1946-1949
Elle recommence à peindre avec intensité, compile ses conceptions esthétiques et plastiques dans des classeurs.
1950
Voyage dans le nord de la Norvège, durant lequel elle tient un journal.
1951
Elle exécute trois peintures pour l'établissement thermal Farris, à Larvik.

«Solitude» La maison (section d'or)
1947
Tempera sur panneau de bois Isorel Fondation Hartung-Bergman

N°58-1949 Pluie
1949
Tempera sur panneau de bois Isorel Fondation Hartung-Bergman
Pluie témoigne des recherches de Bergman sur la relation entre les couleurs et l'étude du nombre d'or dans les tableaux des maîtres. Ces essais de fragmentation de la lumière et de l'espace résonnent avec les recherches futuristes et cubistes du début du siècle, mais le choix de les appliquer à un phénomène atmosphérique est ici totalement original. Bergman représente l'effet du vent sur la pluie qui tombe par des mouvements verticaux et obliques. L'humidité environnante est rendue par des tons bleutés. Bien plus tard, au milieu des années 1970, Bergman donnera une tout autre dimension picturale à ses captations d'effets atmosphériques avec d'autres peintures figurant la pluie, mais aussi des vagues et le mistral.

Composition
1951
Tempera et feuille de métal sur panneau de bois contreplaqué The National Museum of Art, Architecture and Design, Oslo

Arktisk komposisjon
1950
Tempera et encre de Chine sur papier
Fondation Hartung-Bergman

Non titré
1950
Tempera sur papier
Fondation Hartung-Bergman

Finnmarks impression
1950
Tempera, encre de Chine et mine de plomb sur papier
Fondation Hartung-Bergman

Non titré
1950
Tempera et encre de Chine sur panneau de bois Isorel 
Fondation Hartung-Bergman

N°34 Rêves bleus
1951
Tempera à la caséine sur panneau de bois Isorel 
Fondation Hartung-Bergman
Rêves bleus appartient à la période où Bergman revient à la peinture dans une veine abstraite qui lui permet d'expérimenter les relations entre les couleurs, les sensations - et même les émotions -, avec des effets de compositions inspirées soit par les formes de la nature, soit par son monde intérieur, comme dans le cas présent. Elle est ici encore très proche de l'univers visuel de Klee ou de Kandinsky, qui ont eux-mêmes cherché à mettre en évidence des synesthésies dans leur art, entre son et couleur, rythme et sensations psychologiques. Les signes qui apparaissent dans les toiles de cette époque, dont certaines présentent aussi des formes organiques ou biomorphiques, sont en phase avec l'absorption du vocabulaire surréaliste par les artistes norvégiens qui pratiquent l'abstraction après-guerre et dont Bergman est proche.

N°ca-1948-50
1950
Huile et feuille de métal sur panneau de bois Isorel
 Fondation Hartung-Bergman

Sans titre 
1951
Huile et feuille de métal sur panneau de bois Isorel 
Fondation Hartung-Bergman

Citadellet, août 1950
Mine de plomb sur papier
Fondation Hartung-Bergman

Non titré
1951
Encre de Chine et gouache papier
Musée d'Art Moderne de Paris

Fragment d'une île en Norvège 
1951
Mine de plomb sur papier
Fondation Hartung-Bergman

Phare (conventions)
1951
Tempera sur panneau de bois Isorel Fondation Hartung-Bergman

 Composition de la Citadelle
1951
Tempera sur panneau de bois Isorel Fondation Hartung-Bergman

Citadelle noire et macabre
1951
Tempera sur panneau de bois Isorel
Fondation Hartung-Bergman

Noir stylistique (noir blanc ocre)
1951
Tempera sur panneau de bois Isorel Fondation Hartung-Bergman

Gris-solitude (noir blanc ocre)
1951
Tempera sur panneau de bois Isorel Fondation Hartung-Bergman

Sans titre 
1952
Huile sur toile
Fondation Hartung-Bergman


Stèle avec lune
1953
Tempera et feuille de métal sur toile
The National Museum of Art, Architecture and Design, Oslo

Deux formes noires
1952
Huile sur toile 
Fondation Hartung-Bergman

Naissance des formes
Début 1952, Bergman expose en Allemagne. Elle fréquente le critique Will Grohmann et mène une enquête sur les artistes persécutés par les nazis comme Willi Baumeister ou Karl Schmidt-Rottluff. Elle gagne ensuite Paris, reprend une relation avec Hans Hartung. Elle commence à se faire une solide réputation. Que ce soit dans un cadre public ou privé, ses œuvres sont saluées entre autres par Pierre Soulages, les critiques Herta Wescher et Michel Seuphor. Elle intègre la puissante Galerie de France, qui organise sa première exposition en 1958.
Anna-Eva Bergman développe dans les années 1950 une œuvre d'une singularité difficile à situer dans l'histoire de l'art traditionnelle. C'est «une peinture originale qui ne doit rien aux modes», résume le critique Michel Ragon. Ses thèmes archétypiques - pierres, univers, arbres, astres - écartent désormais toute représentation anthropomorphique et tendent à l'abstraction mais sans s'arracher complètement à toute référence. D'ailleurs, elle préfère parler de «non-figuratif» ou d'«art d'abstraire». Bergman élabore une sorte d'alphabet visuel en mutation constante. C'est une perpétuelle <

1952
À Paris, elle présente une toile au Salon de Mai, où elle exposera chaque année jusqu'en 1960. Elle retrouve Hans Hartung.
1953-1954
Elle travaille à l'atelier de gravure Lacourière à Montmartre et participe à plusieurs expositions collectives d'estampes en Suisse, en Norvège et en Suède. 
1957
Remariage avec Hans Hartung. Ils s'installent en 1959 rue Gauguet, près du parc Montsouris. 
1960
Elle exécute ses premières toiles de grands formats (200 x 300 cm). 
1964
Dominique Aubier lui consacre une monographie dans la collection «Le musée de poche» aux Éditions Georges Fall. 

Anna-Eva Bergman dessinant sur la plage de La Croix-Valmer, 1953, photographie Hans Hartung

Un univers
1954
Huile et feuille de métal sur toile Fondation Hartung-Bergman

La griffe
1953
Tempera sur toile
Fondation Hartung-Bergman

Les beaux espaces du MAM

Der Hochschwebende
1955
Huile et feuille de métal sur toile Fondation Hartung-Bergman
Cette œuvre a été choisie par Hans Hartung pour sa collection personnelle. Bergman et lui avaient en effet pour habitude d'examiner et de commenter mutuellement leurs travaux et de s'offrir certaines de leurs peintures. Le titre en allemand, Der Hochschwebende, peut se traduire par «Celui qui surplombe». Sans la désigner directement et sans la rattacher à une religion précise, il évoque une entité spirituelle supérieure qui fait écho au majestueux flottement de la forme circulaire dorée. Les œuvres de Bergman représentent souvent des corps célestes, dont la dimension spirituelle reste toujours ouverte.

Grand soleil
1956
Huile et feuille de métal sur toile
Stortinget, The Norwegian Parliamen
t
Arbre d'argent
1956
Huile et feuille de métal sur toile
Fondation Hartung-Bergman

Crabe d'argent
1955
Tempera à la caséine et feuille de métal sur toile Musée d'Art Moderne de Paris

Le grand nord
1956
Tempera et feuille de métal sur toile Fondation Hartung-Bergman
Avec ce grand roc bleu profond, qui s'érige comme une proue ou une stèle - deux autres motifs récurrents de son répertoire de formes alors en pleine élaboration. dans les années 1950-, Bergman symbolise un espace géographique dont l'expérience pose les limites de l'existence humaine. Il s'agit de l'immensité des paysages septentrionaux que l'artiste a observés lors de son voyage dans le nord de la Norvège en 1950, la rigueur de leur climat et la faible occupation humaine qui les caractérise. Par sa prestance et ses dimensions imposantes, l'œuvre, qui domine le spectateur, contribue presque à personnifier une donnée géologique qui redéfinit nos conditions d'existence et notre proportion toute relative dans l'Univers.

Moïse ou Grand arbre
1957
Tempera et feuille de métal sur toile Fondation Hartung-Bergman
Bergman propose ici une équivalence plus qu'un choix entre la désignation du prophète Moïse, personnage des Écritures communes aux religions juive, chrétienne et musulmane, et celle d'un de ses motifs favoris, l'arbre. Les deux se rejoignent pour évoquer une certaine forme de sagesse, de puissance et de solennité monumentale, présentes aussi bien dans la civilisation et le savoir humain que dans la nature terrestre. De l'arbre, l'artiste ne retient que l'ampleur du tronc et la force dynamique et rayonnante des branches. Le soin apporté à la couleur des glacis qui recouvrent les feuilles de métal tend à évoquer les reflets vert bleuté des lichens.

Le tombeau de Théodoric
1960
Huile et feuille de métal sur toile
Fondation Hartung-Bergman

Grand tombeau
1960
Huile et feuille de métal sur toile
Fondation Hartung-Bergman

Grande vallée
1960
Huile et feuille de métal sur toile
Fondation Hartung-Bergman

Pyramide
1960
Huile et feuille de métal sur toile Fondation Hartung-Bergman
Dans toute sa simplicité géométrique, la pyramide, construite au nombre d'or, se présente comme un symbole monumental de stabilité, de sécurité et de paix. Le fond est préparé à la tempera rouge puis recouvert de feuilles d'aluminium, dont l'aspect gris acier est nuancé par un glacis bleu. Le motif pyramidal est traité avec des feuilles d'argent dont les côtés ne se touchent pas forcément, ce qui leur confère l'aspect architectural d'une pierre de taille. Ces quelques millimètres d'écart entre les feuilles d'argent rendent visible la sous-couche rouge, innervant d'énergie chaude les nuances gris-bleu. Des décalages très subtils du motif de la pyramide par rapport au cadre créent une impression de mouvement ou de lévitation.

La grande montagne
1957
Huile et feuille de métal sur toile Fondation Hartung-Bergman

Forme noire
1955
Huile sur toile
Fondation Hartung-Bergman

Îlot
1957
Tempera et feuille de métal sur toile Fondation Hartung-Bergman

Forme orange
1955
Huile et feuille de métal sur toile
Fondation Hartung-Bergman

Double mur
1959
Huile et feuille de métal sur toile Fondation Hartung-Bergman


Anna-Eva Bergman avec la toile N°1-1954 Un grand univers, rue Cels, 1954, photographe non connu

Alphabet
En 1958, Anna-Eva Bergman présente pour la première fois, dans une série d'œuvres sur papier à la tempera et feuilles métalliques, les bases du répertoire de formes qu'elle a développé depuis 1952: pierre, lune, planète, arbre, montagne, tombeau, vallée, barque, miroir, etc. Elle les compilera en une liste exhaustive à la fin des années 1960 pour détailler les thèmes qui lui permettent de créer une sorte d'alphabet, développant des catégories et précisant leurs développements et leurs transformations successifs dans ses peintures et estampes. À chacune des grandes étapes de son évolution artistique, Bergman effectuera le point sur ce vocabulaire symbolique qui irrigue toute son œuvre.

1958
Première exposition personnelle à la Galerie de France. .
1960
Expositions personnelles d'estampes à New York puis à Florence, et de tempera à Paris à la galerie La Hune. 
1962
Nouvelle exposition personnelle à la Galerie de France. 
1966
Rétrospective au Kunstnernes Hus à Oslo et au Bergen Kunstforening 
1967
Rétrospective au Museo Civico de Turin. 

Morceau de montagne
1958
Tempera et feuille de métal sur papier Fondation Hartung-Bergman

Barque
1958
Tempera et feuille de métal sur papier Rives
Fondation Hartung-Bergman

Pyramide
1958
Tempera et feuille de métal sur papier
Fondation Hartung-Bergman

Planète éclatée
1958
Tempera et feuille de métal sur papier
Fondation Hartung-Bergman


Anna-Eva Bergman dans son atelier de la rue Gauguet,
Paris, 1964, photographie Eddy Novarro

Dans l'atelier
Bergman utilise la feuille de métal (or, argent, aluminium, cuivre, étain, plomb, bismuth) dès les années 1940, inspirée par les retables des églises norvégiennes du Moyen Âge. Elle n'a de cesse de personnaliser cette technique, employant d'abord le bol d'Arménie (préparation argileuse colorée) sur lequel les feuilles sont polies avec une pierre d'agate, puis la dorure à la mixtion, vernis gras qui facilite l'adhésion du métal. À partir de 1950, elle peint principalement à la tempera. Dans les années 1960, elle opte pour une peinture vinylique, puis pour l'acrylique la décennie suivante. L'évaporation de la phase aqueuse contenue dans ces préparations requiert des gestes directs. Ces procédés sont tout sauf spontanés et exigent la maîtrise de plusieurs étapes, toutes interdépendantes et soigneusement préparées. Les fonds préparatoires sont très colorés, ainsi que les vernis et les glacis qu'elle applique sur le métal afin d'en diversifier les reflets. À partir des années 1960, elle travaille dans la matière même de l'œuvre en arrachant les feuilles de métal pour faire apparaître des strates sous-jacentes ou en apportant du volume et de la texture à la matière picturale avec la modeling paste.
Dans le domaine de l'estampe, elle maîtrise la lithographie et les traditionnelles techniques sur cuivre (eau-forte, aquatinte, vernis mou, taille-douce). Elle a une prédilection pour la gravure sur bois. Elle y excelle, jouant avec les veines et les stries naturelles du matériau, sublimé par des tirages réalisés à l'or, à l'argent ou au bleu manganèse

1950
Visite la cathédrale de Nidaros à Trondheim et l'église
de Trondenes lors de son voyage dans le nord de la Norvège. Première œuvre à la feuille de métal comprenant deux formes dorées, qui, à l'analyse, ont révélé contenir du cuivre et du laiton. 
1952
Réalise à l'atelier Jean Pons une série de cinq lithographies à partir de ses dessins sur le thème des pierres. En 1953 elle travaille à l'atelier de gravure Lacourière à Montmartre. 
1963
Entame une collaboration avec l'atelier Erker à Saint-Gall, en Suisse, une librairie, mais aussi galerie d'art, maison d'édition, atelier lithographique, fondée par Jürg Janett et Franz Larese. Elle y produira des estampes pendant plus de dix ans. 

Barque sous l'eau
1957
Gravure sur bois sur vélin d'Arches Épreuve justifiée 5/1s et timbre sec AEB Atelier Patris, Paris, imprimeur Musée d'Art Moderne de Paris

Rocher
1957
Gravure sur bois sur vélin d'Arches Épreuve justifiée 4/1s et timbre sec AEB Atelier Patris, Paris, imprimeur
 Musée d'Art Moderne de Paris



Anna-Eva Bergman peignant N°67-1966 Grand océan rue Gauguet, Paris, 1962, photographie Hans Hartung


Cosmogonies, transcriptions paysagères
En 1964, Anna-Eva Bergman et Hans Hartung voyagent le long de la côte nord de la Norvège jusqu'au cap Nord et en rapportent près d'un millier de photographies. Pendant de nombreuses années, Bergman puisera son inspiration dans les esquisses et les images de ce voyage. À la même époque, elle achète un terrain en Espagne, à Carboneras. Elle y projette une maison-atelier (non réalisée) orientée en cinq parties autour d'un patio, à partir du dessin d'un pentagramme issu de ses recherches des années 1948-1949.
De nombreuses œuvres portent la trace de ce tropisme Nord-Sud qui, loin de s'opposer entre ce qui serait prétendument froid et polaire d'un côté, chaud et solaire de l'autre, se confond souvent, notamment dans l'expression d'immensités désertiques. Bergman ne se contente pas de retranscriptions paysagères brutes, purement inspirées du motif naturel. Elle se passionne à la fois pour les systèmes de représentation du monde issus des mythes anciens et pour les plus récentes avancées scientifiques de son temps, notamment en matière d'archéologie et d'astronomie. Elle s'imprègne ainsi de nombreuses visions cosmogoniques, depuis les classiques de la littérature (L'Épopée de Gilgamesh, l'Ancien et le Nouveau Testament, Dante et même Howard Phillips Lovecraft...) jusqu'aux découvertes astrophysiques modernes. Dans les années 1950-1960, elle lit par exemple des ouvrages d'Einstein, s'enthousiasme pour la conquête spatiale et s'abonne à la revue Planète.


Carboneras
1963
Huile et feuille de métal sur toile Fondation Hartung-Bergman
Amorcé en 1962, le thème de l'horizon fait son apparition dans la peinture de Bergman et devient pour elle un motif cardinal qui va prendre une place cruciale jusqu'à la fin de sa vie, en tant qu'il exprime et promet un «domaine [...] physiquement inatteignable pour l'homme », mais «dont on peut faire l'expérience>>. L'intérêt plastique de Bergman pour l'horizon provient de la topographie de Carboneras, précisément retranscrite dans cette œuvre grâce à l'emploi des feuilles métalliques. En contrastant avec un ciel très sombre, leurs reflets reproduisent l'éblouissement ressenti sur cette terre aride d'Andalousie brûlée par la lumière aveuglante du soleil.

Mur
1964
Vinylique et feuille de métal sur toile Musée d'Art Moderne de Paris
Inspiré par ses voyages en Espagne (rappelant les appareillages de pierre des édicules anciens des environs de Carboneras) et dans le nord de la Norvège (dont il évoque les falaises ou les fjords), ce mur traduit l'attention particulière de Bergman à la lumière et à l'architecture. Il résonne avec ses premières peintures et aquarelles méditerranéennes des années 1930, des remparts médiévaux de Saint-Paul-de-Vence aux maisons vernaculaires de Minorque, aux Baléares. Les reflets métallisés des feuilles d'or et d'argent soulignent les aspérités du motif, évoquant un mur éclatant de lumière qui se détache sur un ciel sombre.

Montagne sombre
1965
Huile et feuille de métal sur toile
Fondation Hartung-Bergman

Falaise
1965
Vinylique et feuille de métal sur toile Fondation Hartung-Bergman

Fjord
1967
Vinylique et feuille de métal sur toile Fondation Hartung-Bergman

Feu
1962
Huile et feuille de métal sur toile Fondation Hartung-Bergman

Stèle
1964
Vinylique et feuille de métal sur toile Musée d'Art Moderne de Paris
Les stèles évoquent les roches taillées ancestrales aux fonctions funéraires ou sacrées. En Scandinavie, les majestueux et mystérieux monolithes runiques sont autant de monuments chargés de magie et de légendes qui fascinent Bergman, férue d'archéologie. L'emploi des feuilles de métal vise à «atteindre un effet irréel»: la pierre qui compose la stèle perd son épaisseur pour devenir une surface miroitante. La toile prend une dimension spirituelle, répondant au souhait de l'artiste d'inciter «le spectateur à ressentir le silence intérieur que l'on ressent quand on entre dans une cathédrale ».

Grand océan 1966
Vinylique et feuille de métal sur toile Fondation Hartung-Bergman
Cette œuvre est une véritable tentative de capter la liquidité et la matière de l'eau dans sa réalité terrestre à la fois la plus évidente et la plus difficile à cerner. Bergman a travaillé en relief les mouvements de l'eau avec un enduit épais recouvert de feuilles de métal en superposant en transparence des glacis bleutés. L'ampleur de la toile enveloppe tout entier le spectateur dans une expérience visuelle qui peut lui donner l'impression de ne faire qu'un avec l'élément liquide dans une certaine forme de plénitude. Il est permis de penser à la notion philosophique de sentiment océanique», conçue par l'écrivain Romain Rolland dès les années 1900, pour qualifier la sensation d'unité avec l'Univers ou ce qui nous dépasse, en lien avec l'idée d'éternité.

Montagne transparente
1967
Vinylique et feuille de métal sur toile Fondation Hartung-Bergman
«La nuit était indescriptible. Dépassant tout ce que je pouvais imaginer. Le plus merveilleux des soleils pendant toute la nuit tandis que nous glissions entre toutes les silhouettes magiques et étranges que sont les [îles] Lofoten. Une aventure glorieuse, puissante et improbable. Les montagnes semblent transparentes, plus rien n'a d'épaisseur. Tout est comme une vision, une possibilité non encore réalisée. Si l'on veut peindre cela, il faut trouver l'expression qui suggère l'atmosphère, l'effet des couleurs. En aucune façon naturaliste.»> Anna-Eva Bergman, 29 juillet 1950, Voyage au cap Nord

Grand rond
1968
Vinylique et feuille de métal sur toile
Fondation Hartung-Bergman

Hiver horizon du Nord
1966
Vinylique et feuille de métal sur toile Fondation Hartung-Bergman
Ce Finnmark peut être interprété comme une évocation de la nature septentrionale de la Norvège, mais il fait immanquablement penser à un sol lunaire frappé par le soleil et cerclé par le noir de l'espace interstellaire. Peu de temps sépare cette peinture des premiers pas de l'homme sur la Lune. Bergman est fascinée par la conquête de l'espace. Elle est abonnée à la revue Planète et apprécie aussi la science-fiction, notamment Lovecraft, dont elle possède une édition de Démons et Merveilles de 1955. Cette œuvre excède largement le statut de paysage local et relève de la vision cosmique.

Demi-terre-1974-1975
1975
Tapisserie (chaîne de coton, trame de laine et louisor argent, basse lisse) Paris, Mobilier national
Entre janvier 1971 et août 1972, sept tapisseries issues de trois maquettes réalisées par Bergman sont tissées dans les prestigieuses manufactures des Gobelins et de Beauvais, puis six autres productions seront lancées entre 1972 et 1974. Cette Demi-terre est l'un des premiers tissages de 1975 réalisés dans le cadre de cette collaboration. L'oeuvre nous met en situation de contempler notre planète depuis un autre point de l'espace, comme si nous assistions au coucher de la Terre depuis un autre astre.

Grand Finnmark rouge
1967
Vinylique et feuille de métal sur toile Fondation Hartung-Bergman
«C'est du Finnmark et de la Norvège du Nord que je rêve. La lumière me met en extase. Elle se présente par couches et donne une impression d'espaces différents en même temps très très près et très très loin. On a l'impression d'une couche d'air entre chaque rayon de lumière et ce sont ces couches d'air qui créent la perspective. C'est magique.» Anna-Eva Bergman, 1979

Paysage jour et Paysage nuit
1968
Vinylique et feuille de métal sur toile Fondation Hartung-Bergman

Paysage nordique
1969
Vinylique et feuille de métal sur panneau de bois contreplaqué
Fondation Hartung-Bergman
Ses transcriptions paysagères tendent toujours à être des univers en soi. Bergman, comme Malevitch, Klee ou Kandinsky avant elle, et comme Mark Rothko, qu'elle rencontre pour la première fois en 1964, voit dans chacune de ses peintures un tout qui «> «à travers les couleurs et la géométrie». Par le biais de ses étagements colorés, Paysage nordique synthétise la variété topographique des grands espaces du Nord, l'effet de superposition que provoquent les reflets de la lumière selon l'alternance des zones glacées, fluviales ou herbeuses des terres du Finnmark

Autre terre, autre lune
1969
Vinylique et feuille de métal sur panneau de bois contreplaqué Fondation Hartung-Bergman

Grand horizon bleu
1969 Vinylique et feuille de métal sur toile Fondation Hartung-Bergman
<< Pour moi, [l'horizon] contient l'éternité, l'infini, le passage vers l'inconnu. [...] L'horizon est la limite de l'expérience humaine [...]; une limite que j'essaie de dépasser, une expérience que je tente d'élargir. Au-delà de la frontière de l'horizon se trouve un domaine qui, quoique physiquement inatteignable pour l'homme, existe et dont on peut faire l'expérience. Peut-être ce vécu doit-il être appréhendé comme une pure expérience de la Nature, quelque chose d'atmosphérique, d'irrationnel, comme l'est la métaphysique, ou l'absolu.»> Anna-Eva Bergman, 1984


Anna-Eva Bergman montrant l'œuvre N°25-1981 Lac II à Hans Hartung dans son atelier à Antibes, 1984, photographie Gérard Gastaud

Épures, captations atmosphériques
Anna-Eva Bergman et Hans Hartung s'installent à Antibes en 1973 dans une villa qu'ils ont fait édifier au milieu d'un champ d'oliviers centenaires. Leurs ateliers respectifs reflètent leur vision de l'espace, nourrie de toutes leurs précédentes maisons-ateliers. L'œuvre de Bergman y évolue vers l'expression de formes simples et monumentales, aux couleurs restreintes, témoignant d'un minimalisme presque solennel. Elle poursuit la révision de ses thématiques et, sensible aux aléas météorologiques de la Côte d'Azur, se lance dans l'étonnante captation atmosphérique de «
Toujours perceptibles, les motifs et les paysages sont suggérés par la création d'une ambiance et par l'expression de sensations captées dans la réalité environnante, mais ils sont concentrés en de majestueux signaux: sensation du reflet de la lumière sur une étendue glacée; vision d'un pan de montagne ou d'une proue se découpant sur la nuit polaire; lac ou étendue d'eau miroitant à l'aube; terre aride brûlée par le soleil; ciel blanchi par le blizzard ou la chaleur; horizon paraissant démultiplié dans la superposition des effets de lointains ou tranché net entre le sol et le ciel; barque ou planète glissant dans l'espace. Comme le montre dans sa peinture la récurrence du thème funèbre de la demi- barque, symbole de danger et de mort, l'artiste apparaît consciente d'une certaine finitude: la sienne et celle du monde.

Crête de montagne
1971
Acrylique, modeling paste et feuille de métal sur toile
 Musée d'Art Moderne de Paris

Ciel noir
1973
Acrylique et feuille de métal sur toile Collection privée, Paris

Vague I
1974
Acrylique, modeling paste et feuille de métal sur toile
 Fondation Hartung-Bergman

Vague baroque
1973
Acrylique, modeling paste et feuille de métal sur toile
 Fondation Hartung-Bergman

Pluie
1974
Acrylique, modeling paste et feuille de métal sur toile 
Fondation Hartung-Bergman

Deux Nunataks
1976
Acrylique et feuille de métal sur toile Fondation Hartung-Bergman

Lac II
1981
Acrylique et feuille de métal sur toile Fondation Hartung-Bergman

Rocher sauvage
1975
Acrylique et feuille de métal sur toile Musée d'Art Moderne de Paris

Pic de montagne II
1981
Acrylique et feuille de métal sur toile
Fondation Hartung-Bergman

Sans titre 
1987
Acrylique, modeling paste et feuille de métal sur toile
Fondation Hartung-Bergman

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