jeudi 10 novembre 2022

Ugo Rondinone au Petit-Palais en novembre 2022


En marge de la visite de la rétrospective sur les œuvres de Walter Sickert, découverte de cet artiste plasticien dont voici la présentation de "THE WATER IS A POEM UNWRITTEN BY THE AIR
NO. THE EARTH IS A POEM
UNWRITTEN BY THE FIRE" par les 
commissaires de l'exposition, 
Juliette Singer, conservatrice en chef du patrimoine au Petit Palais
Erik Verhagen, professeur en Histoire de l'art contemporain :

L'intervention d'Ugo Rondinone au sein du Petit Palais réside en deux
ensembles de travaux, prolongés par une installation vidéo inédite.
S'articulant autour de corps humains en prise avec les éléments et la nature, ceux-ci s'inscrivent dans la continuité des multiples familles d'œuvres produites par l'artiste depuis la fin des années 1980. La terre, le ciel, l'air, l'eau et le feu associés à des êtres au repos ou en mouvement sont ici convoqués, dans toute leur dimension spirituelle.
Le premier ensemble de travaux qui accueillent les visiteurs, humansky,
souligne d'emblée cette confusion entre l'être et les éléments. Sept corps moulés, agrémentés d'un « camouflage » évoquant un ciel bleu constelléde nuages, sont suspendus. Ils confrontent le visiteur à l'eau et à l'air.
Le deuxième ensemble, d'où est historiquement née cette trilogie, est.
constitué des nus. À base de cire transparente mélangée avec de la terre, prélevée sur sept continents, ces sculptures présentent aussi un aspect << camouflé »>, produit par l'assemblage de ces matières non homogènes.
Elles mettent en scène des corps de danseurs et danseuses assis et au repos.
Réalisés à échelle humaine, ces nus semblent d'abord réalistes, avant
que le visiteur, en s'approchant, ne découvre leur aspect clairement artificiel, particulièrement visible au niveau de la jonction de leurs membres avec leur corps. Ces sculptures sont ainsi << paradoxales » et conformes en cela
à l'esthétique d'Ugo Rondinone: il joue sur « l'opposition » entre ce qui est attendu d'un danseur ou d'une danseuse, et la pose qu'il leur fait prendre.
Ces corps immobiles, repliés sur eux-mêmes, évacuent tout geste
chorégraphié et toute référence à l'espace scénique : immobiles, ils semblent se fondre avec la nature, l'esprit concentré, perdus dans un état méditatif.
D'un ensemble à l'autre, les visiteurs assistent à un processus de mutation
des corps: d'une suspension éthérée avec humansky, à une quasiléthargie
avec les nus, les corps « renaissent » dans le film burn to shine, dont
la présentation au Petit Palais constitue une première mondiale. Le film est projeté sur six écrans, à l'intérieur d'un écrin cylindrique en bois calciné qui forme un cercle, figure géométrique récurrente chez l'artiste. Le corps est
ici en mouvement: 12 percussionnistes, 18 danseurs et danseuses sont réunis
dans le désert, autour d'un feu. S'adonnant à une transe ancestrale héritée du Maghreb, conjuguée aux gestes d'une danse contemporaine pensée avecle concours du chorégraphe franco-marocain Fouad Boussouf, ils s'unissent
à la nature, du coucher du soleil jusqu'à l'aube, au moment où le soleil se lève de nouveau.
Les lattes en bois du cylindre obstruent toute vue extérieure : elles indiquent un passage. Depuis ses débuts, Ugo Rondinone considère en effet nécessaire de créer un environnement clos, « isolé », pour pouvoir engager un dialogue
avec la nature, au sein d'un espace fermé. Pour lui, il est important d'imaginer des dispositifs visant à atténuer la présence du paysage urbain environnant.
Les filtres posés sur les fenêtres - when the sun goes down and the moon comes up - participent de cette volonté et nous rappellent surtout que toute exposition de l'artiste est, en soi, une œuvre à part entière.
Selon Ugo Rondinone, ce qui relierait les deux premiers groupes à burn
to shine est un désir de transformation : « L'inspiration initiale est venue d'un poème de John Giorno intitulé "Tu dois brûler pour briller". Un proverbe
bouddhiste sur la coexistence de la vie et de la mort, semblable à
la mythologie grecque bien plus ancienne du phénix, l'oiseau immortel qui se régénère de manière cyclique ou renaît d'une autre manière.
Associé au soleil, un phénix reçoit une nouvelle vie en renaissant des cendres de son prédécesseur ».
Enfin, l'artiste a tenu compte des œuvres du Petit Palais auxquelles
les siennes sont confrontées. Il s'est appuyé sur les sculptures
anthropomorphiques de la collection du musée pour mieux "asseoir"
les nus et a entouré le cylindre de burn to shine de quatre peintures
d'Eugène Carrière.


Extrait de la chorégraphie du film Burn to Shire présentée dans la structure au milieu de la galerie des statues:


On termine ce post par la belle couronne de la nuit offerte par Jean-Michel Othoniel au Petit-Palais :

Jean-Michel Othoniel
Né en 1964
La Couronne de la Nuit
2008
Verre de Murano soufflé et miroité, acier
Dédiée à la reine de la Nuit de La Flûte enchantée de Mozart,
cette couronne géante est dominée par les tons bleus, étoilés
de quelques perles rouges. Deux cœurs romantiques, en son
centre, sont surmontés d'une énorme boule-miroir, qui englobe
dans son reflet aussi bien la voûte, sans doute autrefois
occupée par un lustre, que le spectateur. Très théâtrale, elle
contribue à « réenchanter le monde », comme le Kiosque des
Noctambules du même artiste, situé près de la Comédie-
Française à Paris.
Don de l'artiste et de la galerie Emmanuel Perrotin.

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