Escapades culturelles: Les Fables de La Fontaine au musée Gustave Moreau en février 2022

Cette exposition constitue un événement et l'aboutissement d'un rêve qui semblait jusqu'ici inaccessible.

Elle offre au public le privilège de découvrir soixante-quatre chefs-d'œuvre de l'aquarelle illustrant les Fables de La Fontaine par Gustave Moreau (1826-1898) à la demande d'Antony Roux (1833-1913), l'un de ses principaux collectionneurs. Jamais exposés depuis 1906 et réservés, à l'origine, à la seule jouissance du commanditaire désireux d'en faire un unique livre, ces chefs-d'œuvre reviennent exceptionnellement dans le lieu où ils virent le jour entre 1879 et 1884: la maison-atelier de Gustave Moreau.

Pas de photo autorisée dans l'exposition, quelques clichés dérobés de ces aquarelles.

Les Fables exposées En 1881, la Société d'Aquarelistes français organise une première exposition dans le salon privé qu'elle occupe chez Durand-Ruel. Les aquarelles de Moreau figurent au nombre de vingt cing parmi des illustrations realisées par différents artistes. En 1882-1883, Roux abandonne son projet d'ouvrage à plusieurs mains, et décide de confier la totalité des fables retenues au seul Moreau. Entre 1879 et 1884, Moreau réalise donc soixante-quatre aquarelles consacrées aux Fables. Elles seront présentées du 27 mars au 26 avril 1886 à la galerie Boussod et Valadon, rue Chaptal à Paris avant de partir pour Londres la même année. Elles seront montrées une ultime fois en 1906, lors de l'exposition posthume dédiée à Moreau sous l'égide de la Comtesse Greffulhe.

Le lion amoureux

Collection particulière

Démocrite et les abdéritains

Collection particulière

Le sujet de cette fable est emprunté à l'ouvrage de 1632 de Marcellin Bompard, médecin ordinaire du roi Louis XIII, commentant les échanges apocryphes du médecin Hippocrate et du Sénat de la cité d'abdère. Livrée en avril 1881, le vision de Moreau, avec Démocrite au premier plan séduisit son destinataire et le public de l'exposition de 1881.

Du thesauriseur et du singe

Collection particulière

A la réception de cette aquarelle en novembre 1879, Roux écrivit à Moreau: si j'avais à décerner des récompenses. peut-être la plus grande, je la réserverais au thésauriseur. Je ne pense pas, je ne crois pas qu'on puisse s'élever plus haut. A plusieurs reprises par la suite, il redira son admiration pour cette oeuvre inspirée de Rembrandt.

Le chêne et le Roseau

Collection particulière

Cette fable donna toute satisfaction à son commanditaire, qui la considérait comme une "merveille". Fait exceptionnel dans son oeuvre, Moreau signe ici un paysage pur. La source pourrait en être une œuvre du peintre Achille Etna Michallon, peinte en 1816 sur le même sujet. Aujourd'hui conservée au Fitzwilliam Museum à Cambridge (Grande-Bretagne), elle aurait pu être vue par Moreau dans une collection privée parisienne.

La mort et le bûcheron

Collection particulière

Le dragon à plusieurs têtes

Le dragon à plusieurs queues

Collection particulière

Le rat des villes et le rat des champ

Collection particulière

En septembre 1880, Antony Roux demande à Gustave Moreau d'exécuter cette composition dans le style Louis XIII et de disposer sur la table des bibelots à la Benvenuto Cellini. Moreau peint une nature morte somptueuse, livrée en février de l'année suivante, qui emprunte à des sources diverses: revue L'Art pour tous, peintures flamandes et hollandaises du musée du Louvre, vases et surtout de table de ce même musée, etc. Le collectionneur s'extasiera devant sa science de la lumière, de la couleur et de la mise en scène.

La grenouille qui voulait se faire aussi grosse que le bœuf

Musee Gustave Moreau

Étude sur le lion

Jardin des plantes septembre 1881

Étude de vautours

Jardin des plantes août 1881

Aux sources des Fables

Dans le premier recueil de 1668, La Fontaine offre au lecteur, avant ses premières fables, un texte qu'il intitule La Vie d'Esope le Phrygien. Il reprend là une tradition qui remonte au xiv siècle, fixée par le moine byzantin Maxime Planude, le premier à faire précéder ses Fables d'une biographie de son illustre devancier. Le fabuliste latin Phèdre et ses successeurs, jusqu'aux auteurs de la Renaissance, serviront également de modèles à La Fontaine.

Moreau, quant à lui, se livre à tout un travail d'appropriation des motifs évoqués par La Fontaine. Pour ce faire, il fréquente la ménagerie du Jardin des Plantes afin de rendre des animaux vrais, vivants, aux allures naturelles ». Il arpente les salles du Louvre ou les expositions, consulte les livres de sa bibliothèque et les manuscrits de la Bibliothèque. nationale. Il sait toutefois dépasser toutes ces références en adoptant un regard naturaliste, comme lorsqu'il traite Le Renard et les Raisins.

Études, Fables non réalisées

Musée Gustave Moreau

Les sources d'inspiration

de Gustave Moreau

Moreau n'a pas illustré les Fables dans leur ordre de parution mais en suivant les voeux de son commanditaire et son inspiration. Ses sources ont été multiples; nous avons souhaité illustrer les principales par cette réunion de dessins issus des quelque trois cent cinquante vres préparatoires conservées au musée Gustave Moreau qu'auraient pu accompagner gravures et photographies tant sa documentation personnelle était importante et variée.

Moreau a puisé ses motifs dans cette documentation et bien des détails de ses dessins sont empruntés à la revue Le Magasin pittoresque. Les revues ne sont pas ses seules références, il pille aussi sa bibliothèque, cherchant ses motifs dans La Grammaire de l'ornement de Owen Jones et dans Les Monuments français de Xavier Willemin.

Mais Moreau quitte aussi parfois son atelier. Il va alors copier les manuscrits de la Bibliothèque nationale, les collections du Louvre, principalement les peintures flamandes, hollandaises et les objets d'art. Il s'inspire d'expositions telles que celle des Beaux-Arts de l'Extrême-Orient en 1873. Enfin, comme un jeune étudiant, il se rend également à de multiples reprises au Jardin des Plantes pour y croquer les animaux sur le vif.