samedi 2 octobre 2021

Magritte/Renoir au musée de l'Orangerie en juin 2021

J'ai bien aimé cette expo et ces tableaux  de la "période Renoir" très colorés.
En voici l'essentiel :

MAGRITTE /RENOIR
le surréalisme en plein soleil

De 1943 à 1947, René Magritte peint plus de 70 tableaux qu'il inscrit dans ce qu'il nomme tour à tour sa  "Période Renoir", son "art solaire" ou encore son « Surréalisme en plein soleil ». Ces œuvres recourent à une palette de couleurs vives et à une touche qui évoque celle de l'impressionnisme. Leur iconographie célèbre « le beau côté de la vie » (Fleurs, nus, paysages champêtres...). Étranger à un Surréalisme auquel est d'ordinaire associé Magritte, ce chapitre de son œuvre n'a que rarement bénéficié de l'attention des historiens de l'art, de la bienveillance des commissaires d'exposition.

Inaugurée en 1943, la période « impressionniste » de Magritte est contemporaine de la défaite des troupes allemandes à Stalingrad et d'un espoir qui renaît alors dans l'Europe entière. En 1946, le peintre veut faire de son art "solaire" le modèle d'un renouvellement du surréalisme. L'incompréhension d'André Breton et la déception qu'elle fait naître chez Magritte, le conduit à saborder artistiquement ses projets de réforme du Surréalisme. Cette désillusion explose dans ses peintures « vaches». La présente exposition retrace les étapes d'un espoir qui se mue en un énorme éclat de rire.

NB Sauf indication contraire, les œuvres qui suivent sont de René Magritte

LES TEMPS MENAÇANTS 

Quelques jours après l'invasion de la Belgique par les troupes allemandes, les menaces que font peser sur lui son activisme au sein des groupes intellectuels opposés au fascisme conduisent René Magritte à prendre la route de l'exil. Il séjourne à Carcassonne où le poète Joë Bousquet (1897 - 1950) reçoit nombre d'écrivains et artistes ayant rejoint la  zone libre. Les tableaux peints à Carcassonne expriment sa nostalgie, témoignent de sa solitude. Son épouse Georgette a en effet refusé de le suivre sur la route de l'exil. Alors que les surréalistes se regroupent à Marseille dans l'espoir de pouvoir rejoindre les États-Unis, Magritte ne pense qu'à retrouver la Belgique.


Comité de Vigilance des Intellectuels Antifascistes "Le vrai visage de Rex"
vers 1937 Lithographie sur papier


En 1939, Magritte dessine cette affiche pour le compte du Comité de vigilance des Intellectuels antifascistes. Il y représente l'écrivain et journaliste belge Léon Degrelle, le fondateur du parti nationaliste Rex, reflétant dans un miroir le profil d'Adolf Hitler avec lequel il entretient des liens étroits depuis le début de la guerre. Convaincu que ce genre d'engagement lui vaudra d'être arrêté, Magritte quitte Bruxelles dès l'invasion par les troupes allemandes en mai 1940.

Le présent 1939

Au printemps 1939, alors qu'il est désormais le seul représentant du groupe surréaliste belge resté à Bruxelles, Magritte fait part à l'artiste Marcel Mariën de son inquiétude et de sa lassitude: « Je suis tellement blasé de la peinture que pour me stimuler il faut une association d'idées [...] Ainsi l'aigle au veston. » Symbole de la République de Weimar qui menace alors l'Europe, le rapace a revêtu une inquiétante apparence humaine. En guise d'œufs, il couve trois grelots, l'attribut du fou dans la tradition carnavalesque.

RETOUR DE FLAMME 

En décembre 1940, René Magritte peint Le Retour, l'image d'un oiseau qui retrouve son nid. Le « nid » de Magritte est la capitale Belge qu'il vient tout juste de rejoindre. Celui-ci est d'autant plus douillet qu'il y retrouve son épouse Georgette revenue à son égard à de bons sentiments. Les toiles que réalise Magritte disent sa passion et sa joie de vivre retrouvée (L'Embellie, Le Retour de flamme.)

Il informe Paul Éluard (1895 – 1952) de l'évolution que connait sa peinture : « Il fallait sans doute que je trouve le moyen de réaliser ce qui me tracassait : des tableaux où le beau côté de la vie serait le domaine que j'exploiterais. J'entends par là tout l'attirail traditionnel des choses charmantes, les femmes, les fleurs, les oiseaux, les arbres, l'atmosphère de bonheur, etc. Et je suis parvenu à renouvele l'air de ma peinture, c'est un charme assez puissant qui remplace maintenant dans mes tableaux, la poésie inquiéta. que je m'étais évertué jadis d'atteindre. » (Magritte à Paul Éluard, décembre 1941)

Portrait de Georgette Magritte, 1946

Le retour, 1940

En janvier 1941, la galerie Dietrich à Bruxelles présente les œuvres récentes de Magritte. L'événement a des allures de manifeste : n'y sont présentées que des oeuvres aux titres et aux sujets chargés d'espoir, Les derniers beaux jours, L'Embellie, Le Retour. Après avoir cessé de peindre pendant plusieurs mois, Magritte achève durant l'hiver cette œuvre au titre judicieusement choisi. De retour dans son nid - bruxellois - cet oiseau semble apporter une éclaircie et la promesse d'une Beinture nouvelle.

Les derniers beaux jours, 1940

L'orient, 1941

Le retour de flamme, 1943 

La voie royale, 1944

Au printemps 1944, la victoire des alliés sur l'Allemagne nazie est désormais assurée. Magritte se livre à un véritable hédonisme pictural. Ainsi écrit-il à Marcel Mariën : " Je vais commencer le tableau du soleil aux rayons en fleurs. C'est d'après le dessin que j'en ai fait, une magnifique idée qui pourra avoir des développements sensationnels. Pour la première fois apparaît un effet triomphal qui laisse loin derrière lui les besogneuses inventions de jadis."

SOUS LE SIGNE DE RENOIR

Quelques semaines seulement après la défaite des troupes allemandes à Stalingrad, René Magritte peint un tableau inspiré par Les grandes Baigneuses d'Auguste Renoir (1884–1887). Il collecte les ouvrages récents consacrés au peintre impressionniste, concentre son attention sur ses œuvres tardives. Son intérêt pour Renoir est-il compatible avec son surréalisme ? Magritte est conscient que son apologie de l'hédonisme et du sensualisme contredit les valeurs du surréalisme d'avant-guerre. Un surréalisme qu'il décrit à André Breton (1896 - 1966) comme marqué par « le désarroi » et "la panique ", par une « atmosphère pessimiste ». Son apologie du soleil, son exaltation de la pleine lumière, contredisent les célébrations de la nuit puisées par le surréalisme dans les écrits des romantiques allemands, notamment du poète Novalis (1772-1801). À ces provocations s'ajoute sa désinvolture à l'égard du style, ce dernier refuge de l'authenticité, de la subjectivité. Magritte inaugure une activité de faussaire, copiant Titien (1488 - 1576) ou le paysagiste hollandais Meindert Hobbema (1638-1709), pour un marché avide de maîtres anciens.

Fleurs dans un vase, Renoir 1898

Renoir concédait volontiers que « cela [l]e reposai[t] de peindre des fleurs » et que, face à un bouquet, il pouvait << expérimenter hardiment les nuances et les valeurs sans [s]e soucier de ruiner toute la toile ». Longtemps reléguée au bas de la hiérarchie des genres, la nature morte occupe une place de choix dans la peinture moderne. Face à son marchand, Renoir s'exclamait : « Regardez Vollard, n'est-ce-pas que c'est aussi brillant qu'une bataille de Delacroix ? ». À son tour, Magritte retrouve dans le motif du bouquet « tout l'attirail des choses charmantes » mais surtout le plaisir de peindre et de rendre compte du foisonnement de couleurs et de textures.

Bouquet, Renoir, vers 1900

L'HÉRITAGE DE RENOIR 

Après sa mort en 1919 et l'important hommage que lui consacre le Salon d'Automne l'année suivante, Auguste Renoir fait figure de maître pour les jeunes artistes modernes. Ces derniers s'intéressent notamment à ses œuvres tardives, plus radicales, tant par leur iconographie que par leur facture et couleurs audacieuses. Tandis que Picasso (1881 - 1973) y puise les lignes de la grande tradition, Matisse (1869 - 1954) y retrouve la fraîcheur et l'hédonisme auxquels aspire sa propre peinture. Au tournant des années 1940, René Magritte s'approprie à son tour son « style » et ses thèmes, alors même que le succès populaire grandissant de Renoir auprès des musées et collectionneurs américains contraste avec un désintérêt grandissant de la critique d'art moderniste

Bouquet de tulipes Renoir 1910

La préméditation 1943

Dès 1941, Magritte formule le vœu de concevoir des tableaux représentant "l'attirail traditionnel des choses charmantes, les femmes, les fleurs, les oiseaux, les arbres, l'atmosphère de bonheur". La Préméditation est peut-être la traduction la plus littérale de cette peinture du « beau côté de la vie ». A Renoir, Magritte emprunte la touche impressionniste mais aussi la riche composition florale rassemblant une multitude de variétés (rose, pensée, lilas, tulipe, cosmos, pivoine, lys, dahlia), prétextes à l'exercice des formes et des couleurs.

La leçon d'anatomie, 1943

Femme nu sur un canapé, 
Renoir 1915

Nu couché 
Renoir 1905

L'univers interdit 1943

Au début des années 1930, Magritte peignait des créatures monstrueuses au corps de femme et à tête de poisson. La période du plein soleil voit surgir de véritables sirènes qui empruntent leur pose langoureuse aux nus de Renoir (Nu, 1915) "Il ne faut pas craindre la lumière du soleil sous prétexte qu'elle n'a presque toujours servi qu'à éclairer un monde misérable. Sous des traits nouveaux et charmants, les sirènes, les portes, les fantômes, les dieux, les arbres, tous ces objets de l'esprit seront restitués à la vie intense des lumières vives." (Manifeste du Surréalisme en plein soleil [1946])

La moisson 1943

« Un jour donc, en feuilletant un ouvrage sur l'impressionnisme, Magritte est conquis par l'idée de représenter une baigneuse de Renoir en montrant chaque partie de son corps sous une couleur différente. Le bras gauche est peint en vert, le bras droit et la tête en rouge, tandis qu'au torse violet sont attachées une jambe bleue et une jambe jaune. Or, fondant sur cette liberté, qui est l'apanage des surréalistes et qui les entraîne à prendre les éléments de la création aussi près que possible de l'objet à créer, Magritte, non content de transformer sa baigneuse, emprunte en plus à Renoir sa technique de représentation. » (Marcel Mariën)

Le premier jour 1943

En 1943. Magritte charge Marcel Mariën de lui fournir des ouvrages sur l'impressionnisme. À Renoir, il emprunte la touche vibrante mais aussi les carnations rosées et jusqu'au chapeau de paille en forme de cloche. Le Premier jour qui est peut-être la plus « impressionnistes » des œuvres de l'artiste n'en est pas moins chargée d'humour. Ce portrait d'un violoniste qui fait danser une minuscule ballerine judicieusement placée est peut-être un hommage à Sheila Legge, la danseuse britannique surréaliste avec laquelle il entretint une relation amoureuse en 1936.

Le vertige 1943

La magie noire 1942

Dans l'exposition « Le nu dans l'art vivant » à laquelle il participe en 1934, Magritte découvre une sculpture d'Aristide Maillol qui lui inspire une dizaine de variations. La Magie noire de 1943, commandée par Elisabeth Altenloh, compagne de Marcel Mariën, est l'exacte copie de la première version réalisée dix ans plus tôt, adaptée à la touche impressionniste. Prétexte à une exploration des capacités de la peinture à restituer la sensualité, cette série apparaît à Magritte « un point de départ pour cette recherche du plaisir ».

La magie noire 1943

Le traité des sensations 1944

Étude, torse, effet de soleil
Renoir, 1870

Les Baigneuses Renoir 1919

Véritable testament pictural, Les Baigneuses, achevées en 1919, rassemble l'ensemble des recherches menées par Renoir à la fin de sa vie. Il y célèbre une nature édénique inspirée par son jardin d'oliviers à Cagnes-sur-Mer qui évoque les paysages méditerranéens de la tradition gréco-romaine. Les baigneuses plantureuses, dont les courbes et les carnations doivent tout aux nus de Rubens, traduisent un plaisir de peindre que la vieillesse et la maladie de l'artiste ne sont pas parvenues à entraver. Tant de bonheur et de sensualité ne pouvaient qu'inspirer Magritte,
soucieux de peindre le "beau côté de la vie"

L'hydre 1943

La cinquième saison 1943

Le principe d'incertitude 

La parenthèse « impressionniste » de Magritte ne l'éloigne jamais de sa conviction que la peinture est avant tout une démarche raisonnée et raisonnante, que son art est le vecteur privilégié de l'esprit. Expliquant que la lumière « a le pouvoir de rendre visibles les objets », il met au jour que la peinture, comme les ombres, n'est qu'un simulacre : « On ne peut pas dire avec certitude, d'après l'ombre d'un objet, ce que celui-ci est en réalité. (Par exemple : une ombre d'oiseau peut être obtenue en ombres chinoises par une certaine disposition des mains et des doigts.) »

Image à la maison verte, 1944

La pensée parfaite, 1943

Le sourire 1943

Le regard mental 1946

La bonne fortune 1945

Les premières expositions des oeuvres "Renoir" de René Magritte provoquent des réactions indignées. L'éditeur P.G. van Hecke (1887 - 1967) se lamente de le voir : « entêté, buté, accroché à ses erreurs (et horreurs !) actuelles ». Pour aider à la compréhension de ses œuvres nouvelles, Magritte rédige: L'Imbécile, L'Emmerdeur et L'Enculeur, trois tracts rabelaisiens au « goût » de ses tableaux récents. Sitôt la guerre achevée, Magritte se précipite au domicile parisien d'André Breton et lui propose de faire de son art solaire le programme d'un surréalisme réinventé. Breton en est indigné. Faisant fi des réserves de ce dernier, Magritte rédige un Manifeste du surréalisme en plein soleil qu'il diffuse largement. Si le poète Joë Bousquet et le peintre Francis Picabia (1879-1953) s'y rallient, la plupart des surréalistes s'abstiennent d'y souscrire. Breton lui adresse un télégramme laconique : « Texte anti-dialectique et par ailleurs cousu de fil blanc... ». Magritte répond : "Le fil blanc est sur votre bobine... ". Le sort du « Surréalisme en plein soleil » est scellé.


«L'Imbécile », «L'Emmerdeur >> et « L'Enculeur » 4 juin 1946
Tracts imprimés 

Entre le printemps et l'été 1946, René Magritte, Paul Nougé et Marcel Mariën publient une série de tracts potaches, imprimés à une petite centaine d'exemplaires. Destinés « à des personnages tels que les notaires, militaires, curés, juges, etc. », ces pamphlets antimilitaristes et anticléricaux sont saisis par les autorités avant d'atteindre leurs destinataires. Dans l'un d'eux, Magritte s'en prend aux publicitaires et à ces « travaux imbéciles » auquel il a dû longtemps se résoudre pour des raisons financières. Au sein du groupe surrealiste, on s'éleva parfois contre la véhémence de ces propos scabreux.

Alice au pays des merveilles 1946

Consacrés « surréalistes » dès la naissance du mouvement, Lewis Caroll (1832-1898) et son roman populaire Les aventures d'Alice au pays des merveilles (1865) sont au centre de la querelle du surréalisme en plein soleil, qui oppose Magritte à Breton durant l'été 1946. Ce dernier, qui a consacré un chapitre entier de son Anthologie de l'humour noir à l'auteur britannique se voit reprocher par Magritte : « Dans le passé du surréalisme, nous trouvons une grande affection pour un certain humour dit « noir ». Il serait préférable d'employer une autre dénomination : Phumour-plaisir, le terme « humour noir» éveillant en nous certain sentiment de terreur actuellement dépassé. Nous retiendrons donc, par exemple : Lewis Carroll.

Le somnambule 1946

L'âge de plaisir 1946

OEUVRES GRAPHIQUES

L'« impressionnisme » auquel adhère René Magritte pendant la seconde guerre mondiale connait un développement graphique. Il produit plusieurs séries de dessins réalisés d'une « touche » en virgule. Ces dessins sont pour la plupart des illustrations pour des ouvrages dont la nature s'accorde au « sensualisme » de la « période Renoir ». À l'invitation du libraire-éditeur Albert Van Loock, Magritte réalise six dessins à l'encre de Chine pour une édition pirate de Madame Edwarda, le récit érotique de Georges Bataille (1897-1962). Dans la même veine, Magritte réalise plusieurs dessins destinés à illustrer une biographie du marquis de Sade écrite par Gaston Puel (1924-2013). À la demande de Marcel Baesber, directeur des éditions La Boétie à Bruxelles, Magritte illustre Les Chants de Maldoror d'Isidore Ducasse (1846-1870). L'ouvrage parait en 1948, illustré de soixante dix-sept illustrations. Pour Paul Éluard, il conçoit également une série de dessins illustrant Les Nécessités de la vie et les conséquences des rêves précédés d'Exemples, 1946.

L'air et la chanson 1962
Sans commentaire

Confiture de cheval 1962

Le plaisir dit aussi la jeune fille mangeant un oiseau 1946

Raminagrobis, le chat attendant un train 1946

La pipe sexe 1943

Illustrations pour Madame Edwarda
1946

Dessins exécutés par Magritte pour illustrer la nouvelle érotique de Georges Bataille, Madame Edwarda, publiée anonymement en 1941. 

En 1946, l'éditeur Albert van Loock envisage de publier une édition pirate de Madame Edwarda. nouvelle érotique éditée clandestinement par l'auteur Georges Bataille sous l'Occupation. Approché pour réaliser six illustrations, Magritte ne pouvait être que séduit par ce récit d'une prostituée qui, prétendant être Dieu, se livre à une série d'obscénités en guise de rituels sacrés. En traduisant la touche impressionniste à l'encre de Chine, Magritte invente une écriture constituée d'ondulations pour réaliser ces illustrations, des plus littérales : « Assise, elle maintenait haute une jambe écartée : pour mieux ouvrir la fente, elle achevait de tirer la peau des deux mains. Ainsi les guenilles » d'Edwarda me regardaient, velues et roses, pleines de vie. »

Le bain de cristal 1946

À partir de 1938, Magritte applique à sa peinture les principes de la dialectique hégélienne, en confrontant deux objets a priori étrangers l'un à l'autre. Loin des rencontres fortuites d'objets composées par les surréalistes parisiens, Magritte cherche les associations les plus poétiques, immédiatement perceptibles. En témoigne cette girafe dont le cou répond au pied du gigantesque verre de cristal qui l'accueille. Le sujet donne lieu à de multiples variations, dont celle-ci, réalisée selon la « technique impressionniste» comme l'indique Magritte dans le croquis préliminaire.

La vocation 1964


VACHERIE 

Dans l'exposition Le surréalisme en 1947 qui marque le retour du mouvement sur le sol européen, les œuvres de René Magritte apparaissent dans une section consacrée aux "surréalistes malgré eux". Après le désaveu auquel s'est heurté son Manifeste du surréalisme en plein soleil, cette semi exclusion achève d'irriter Magritte. Lorsqu'au printemps 1948, la Galerie du Faubourg lui propose d'exposer ses œuvres, Magritte y voit l'occasion de solder ses comptes avec le Surréalisme parisien. En quelques jours, il « torche » une série de tableaux outranciers et carnavalesques que ses proches (le poète Louis Scutenaire (1905-1987) le premier) ne peuvent qualifier autrement que de « vaches ». Poussant aux limites du supportable l'intensité chromatique et le grotesque de ses derniers tableaux « Renoir », les œuvres  "vaches" viennent clore l'aventure de son œuvre solaire.

Bouquet de fleurs 1943

PICABIA AUSSI 

Lors de son premier voyage dans le Paris d'après-guerre, René Magritte rend visite à Francis Picabia. Dans son atelier, il découvre les tableaux que l'ancien dadaïste a réalisés pendant la période de l'Occupation. Ces œuvres enthousiasment tant Magritte qu'il propose à Picabia de rédiger la préface de sa prochaine exposition. Prenant aussitôt la plume, il écrit que sa peinture  "oppose à tout un passé envahissant le mouvement et les éclairs de la lumière vive qui font voir la vie tout entière dans son isolement grandiose" Magritte découvre qu'il n'est pas seul à avoir opposé à la terreur nazie, une peinture qui célèbre l'amour et les effusions printanières, qui illustre le "beau côté de la vie".

Main mystérieuse 
Francis Picabia

 Portrait de femme
Francis Picabia Vers 1938

À partir de 1938, Francis Picabia inaugure une série inspirée de l'imagerie populaire, notamment de photographies puisées dans les magazines de mode. Tandis que le verso du tableau représente une composition dadaïste, Picabia s'astreint ici à un réalisme qui confine au kitsch. La découverte de cette série confirme à Magritte la voie d' une peinture sensuelle et joyeuse. Dans un projet de préface, il écrit : « Picabia pense comme on doit penser. En 1946, il oppose à tout un passé envahissant le mouvement et les éclairs de la lumière vive [...] Les tableaux de Picabia bougent. ils échappent à l'idée fixe. Ils sont superficiels comme la vie joyeuse des amoureux.»


L'incendie 1943

L'intelligence 1946

Le lyrisme 1947

En 1831, dans les pages du journal La Caricature, le caricaturiste républicain Honoré Daumier (1808-1879) transformait en poire le portrait du roi Louis-Philippe dont la popularité commençait à s'émousser. Est-ce André Breton que Magritte travestit ainsi, alors même que le chef de file du surréalisme vient de le classer parmi les "surréalistes malgré eux" ? Moquant l'appel à la
magie et à la poésie inspirée du groupe surréaliste, Magritte dépeint un prestidigitateur ubuesque dont les couleurs et l'exubérance grotesque annoncent la période vache.

La liberté de l'esprit 1948

Pom pom pom pom 1948

Le crime du pape 1948

Le psychologue 1948

La vie des insectes 1947

La famine 1948

Directement inspirée d'une œuvre du symboliste belge James Ensor (Squelettes se disputant un hareng-saur, 1891) et de l'imagerie populaire de la bande dessinée Les Pieds Nickelés, La Famine a le ton acerbe et cinglant de la période vache, qui désarçonne le public autant que la critique à l'exposition de la galerie du Faubourg en 1948. 

Squelettes se disputant un hareng-saur, 1891

Je ne pouvait pas quitter l'Orangerie sans passer par les collections permanentes et photographier quelques tableaux  :
Bouquet de Glaïeuls 
Soutine 1919

Femme au violon
Matisse 1923

Antonia
 Modigliani 1915

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