A l'occasion de mon jogging quotidien, détour par le jardin des Tuileries et la place Vendôme pour découvrir quelques oeuvres de l'édition 2023 de cette manifestation annuelle d'art contemporain
Le programme public de Paris+ par Art Basel résulte d'un dialogue nourri et fécond avec les institutions parisiennes, et s'articule autour de différentes propositions artistiques à travers six lieux exceptionnels du paysage culturel et patrimonial : le Jardin des Tuileries, la Place Vendôme, le Parvis de l'Institut de France, les Beaux-Arts de Paris, le Palais d'léna et le Centre Pompidou.
Alex Ayed
Untitled
2023
Clay, olive wood, steel, lime
451.5 x 156 x 162 cm
Balice Hertling, ZERO...
Né en 1989 à Strasbourg
Vit et travaille entre Paris et Tunis
Cette œuvre a la forme d'un pigeonnier, fait de bois d'olivier, d'argile, de paille et recouvert de chaux. Cette technique reste aujourd'hui encore une alternative aux constructions modernes dans le monde méditerranéen. Ce pigeonnier est le résultat de la convergence de différents récits, d'histoires locales, de situations imaginées par l'artiste, du rappel ici des animaux qui peuplent les villes. Les pigeons, utilisés traditionnellement comme messagers, deviennent des passeurs d'histoires.
Vojtech Kovarik
Ares
2023
Polystyrene, metal, concrete
230 x 260 x 290 cm
Né en 1993 à Valasské Meziricí Vit et travail à Brno
Fasciné par la mythologie grecque où tous les êtres étaient hybrides, l'artiste explore la face cachée des héroïnes et leurs tourments intimes. Représentant en grand format des personnages vulnérables, il ouvre la voie à un héroïsme différent, plus humain, ainsi qu'à une nouvelle monumentalité sans grandi-loquence. L'aspect brut de la matière brouille nos repères chronologiques : ce guerrier au repos est-il antique, notre contemporain ou venu du futur ? Face aux thèmes guerriers présents dans ce jardin historique, Vojtech Kovarik nous offre un regard plus intime et une lecture psychologique des états d'âme de certaines figures de l'histoire.
Alicja Kwade Stella Sella
2023
Patinated bronze, stone 123.5 x 59 x 128 cm
Née en 1979 à Katowice
Vit et travaille à Berlin
L'artiste détourne aussi bien les matériaux bruts que les objets du quotidien. Cette œuvre associe un fauteuil à bascule en bronze à une pierre. Cependant, ce rocking-chair ne se balance (<< to rock >>) plus, car il porte une pierre («< a rock ») comme tombée du ciel et trop lourde pour lui. Alicja Kwade repousse les limites de la réalité géologique et humaine. Si cette chaise représente habituellement la détente, une forme de paix, symbolise-t-elle ici le fardeau humain, tel un Sisyphe moderne face à son destin de devoir faire rouler sans fin et en vain son lourd rocher? Au contraire, est-ce la matière vivante de la pierre qui gagne enfin son droit au repos?
John Giorno
LET IT COME LET IT GO
2017
Engraved limestone
90 x 170 x 80 cm
Eva Presenhuber
Andreas Grimm | +41 78 652 98 81
Partenaire Institutionnel | Institutional Partner
Ecole du Louvre
Palais du Louvre
Né en 1936 à New York
Décédé en 2019 à New York
L'artiste a gravé dans un rocher en lettres capitales blanches un court poème, LET IT COME LET IT GO [Laisse venir laisse aller]. Lat répétition des mots comme un cycle témoigne aussi bien de la longue pratique du bouddhisme de l'artiste qu'il rappelle l'aube de la création artistique, celle qui a vu émerger la peinture rupestre et les premiers graffitis. Reprenant cette tradition ancestrale du geste artistique, l'artiste inscrit ses mots sur une pierre installée dans l'espace public, à rebours des slogans qui scandent habituellement les murs de nos rues,
2 permettant à chacun et chacune de
s'approprier cette poésié universelle
Nicène Kossentini The Butterfly
2014
Translucent fiberglass, japanese fabric and resine, 180 × 150 × 10 cm
Selma Feriani
Née en 1976 à Sfax
Vit et travaille entre Tunis et Paris
L'artiste capture la poésie éphémère des contes, de la danse, des mouvements - ici, ceux des battements d'ailes d'un papillon. Fait d'une fragile fibre de verre et d'un délicat tissu japonais, ce papillon au sol évoque les risques de ce rêve de voler, les périls de cette liberté, tel le mythe de la chute d'Icare, dont les ailes fondent quand il s'approche trop près du soleil. Le papillon fascine, depuis le philosophe Nietzsche, pour qui sa légèreté est l'incarnation du bonheur de la vie, jusqu'à Donna Haraway, qui propose dans Vivre avec le trouble, face à la crise environnementale, une alliance des espèces, une nouvelle parenté pouvant lier un humain et un papillon monarque.
Claudia Wieser
But round my chair the children run
2023
Glazed ceramic tiles, copper plates on plywood panels, 313 x 293 x 232 cm
Née en 1973 à Freilassing
Vit et travaille à Berlin
Puisant son inspiration dans l'architecture et l'histoire, l'artiste travaille à l'intersection de l'art et du design. Cette œuvre a été spécialement créée pour le Jardin des Tuileries, où se situaient, au Moyen Âge, des fabriques de tuiles. Elle associe plus de 2000 carreaux émaillés à la main, qui portent les coups de pinceau de l'artiste et sont complétés par des plaques de cuivre polies. Cette composition géométrique, aussi minimaliste qu'imposante, invite le public à admirer, dans cette « œuvre-banc »>, les liens entre la matière et l'espace. Elle renvoie aussi bien à l'histoire de l'habitat moderniste qu'à la longue tradition artisanale parisienne
Tony Cragg
Willow
2014
Bronze
235 x 232 × 251 cm
Né en 1949 à Liverpool
Vit et travaille à Wuppertal
Les couches de formes circulaires de cette sculpture rappellent un saule pleureur que l'artiste observe à côté d'une maison en Suède où il passe l'été. Tony Cragg explore le lien entre le statique et le mouvement, entre la technologie et la nature, entre une forme rationnelle et l'émotion qu'elle suscite. Il a varié les matériaux de la douzaine de sculptures de la série : acier pour les plus petites, bois stratifié, bronze ou pierre pour les plus grandes. Celle présentée ici en est la plus imposante. Malgré la matière dure, les formes molles et fluides semblent s'animer et se métamorphoser, entre motif végétal, abstraction organique et plis protecteurs.
General Idea AIDS Sculpture
1989/2023
Stainless steel, 195 × 195 x 97.5 cm
Esther Schipper, Mai 36
En 1987, en réponse à l'invitation d'Art against AIDS [L'art contre le sida] pour sa campagne de dons, le trio d'artistes canadiens General Idea détourne les couleurs et les lettres de l'œuvre iconique de l'artiste pop Robert Indiana, LOVE (1966), transformée en << AIDS >> [SIDA]. À travers des sculptures publiques, peintures, affiches et papiers peints, General Idea a diffusé son logo AIDS, devenu emblématique de la lutte contre la maladie à travers le monde. Les graffitis ou les collages qui s'accumulent sur la AIDS Sculpture participent du dialogue qu'elle vise à établir avec le public et rappellent l'importance de l'engagement et du débat public.
Zanele Muholi
The Politics of Black Silhouettes
2023
Bronze
Variable dimensions
Née en 1972 à Umlazi
Vit et travaille à Cape Town
L'artiste non binaire et queer mène depuis plusieurs années un vaste projet autour du portrait et de l'autoportrait. Iel donne à voir ceux et celles qui ne sont pas les modèles artistiques habituels, les invisibles, et en particulier les personnes noires LGTBQIA+ dans la société post-apartheid d'Afrique du Sud. Récentes dans son art, ses sculptures entrent en dialogue avec la statuaire du jardin. Questionnant les codes de la représentation, sans socle, elles rendent présentes les absences, du fait du sexe ou de l'origine. Face aux sculptures historiques guerrières, l'artiste se présente en contraste assise et encore entravée, en dormeuse ou émergeant des profondeurs de la Terre.
Romina De Novellis Voulez-vous danser avec moi?
Merci, je ne préfère pas!
2023
Sculpture & performance
400 x 240 x 240 cm
Née en 1982 à Naples
Vit et traivaille à Paris
L'artiste reprend la tradition du kiosque à musique. Paradoxalement, ce lieu de rassemblement lui permet de réfléchir à la solitude que l'on peut ressentir dans les relations humaines, y compris en groupe. L'objet communautaire et poétique du kiosque devient un squelette architectural de fils de fer, décoré de piquants, comme si seuls les souvenirs aigus, mélancoliques ou blessants, restaient. La fête aura-t-elle lieu ? L'artiste est présente plusieurs heures de la semaine. Seule dans le kiosque, elle effectue une danse libre et non chorégraphiée sur une musique issue d'un orchestre. Un jeu se dessine entre sa présence et son absence, le vide rempli par la musique.
Wave (2018) d’Urs Fischer place Vendôme.
Wave est la sixième sculpture de la série « Big Clays ». Ces sculptures sont obtenues à partir d’un ou plusieurs petits morceaux d’argile façonnés par la main de l’artiste. Après avoir fabriqué des centaines de ces formes, il en sélectionne une pour la scanner numériquement et la sculpter à une plus grande échelle. En résultat, l’œuvre préserve la tactilité détaillée de la maquette, tout en la magnifiant en monument. Les dix œuvres existantes de « Big Clays », toutes créées en aluminium, ont été exposées au public dans des villes telles que Florence et New York. L’œuvre Wave, ainsi qu’une autre œuvre de la série, L’Arc (2016), a été achevée par un processus de fraisage qui lui confère une surface plus détaillée et recadre la main de l’auteur. D’une hauteur de plus de 5 mètres, elle semble prise entre la formation et la désintégration, et reflète la fascination de l’artiste pour la figure transformée, rappelant la cire dégoulinante de ses sculptures de bougies. Wave est à la fois abstraite et figurative, contemporaine et intemporelle.
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