NODULES
1991
Terre de brique cuite
Environ 450 pièces/Approx. 450 pieces Courtesy de l'artiste et TEMF LON, Paris-Bruxelles-New York
Modulable à l'envi, cette installation est composée d'environ quatre cents pièces en terre de brique cuite. Étranges, voire inquiétantes, ces pièces sont indéchiffrables. Les visages sont-ils des vanités ou des têtes d'expression? Les corps sont-ils des pantins demembrés, des poupées vaudou, des empreintes pétrifiées semblables à celles de Pompéi ? Seule compte ici la répétition forcenée d'un exercice de style, qui consiste à pressurer de la terre meuble à la manière des enfants entêtés ou des divinités créatrices, La profusion et la réitération, déjà.
TÊTES D'HOMMES
1989
Bois de tilleul peint à l'encaustique/
16 pièces
Courtesy de l'artiste et TEMPLON, Paris-Bruxelles-New York
Ces têtes sauvages, vigoureusement taillées à la tronçonneuse avant d'être recouvertes de peinture, ne sont pas sans rappeler les grandes figures énigmatiques de l'île de Pâques ou les fétiches primitifs - africains ou océaniens. Philippe Cognée, qui passa son enfance et son adolescence au Bénin, partage avec Bourdelle une même admiration pour tous les archaïsmes, ces «
Détail des sculptures précédentes
PROLIFERATION ET REPEINTURE
A u seuil des années 1990, Philippe Cognée inaugure un nouveau procédé : il repeint un ensemble de 285 photographies, prises par ses soins Copiant un motif anodin, qui disparait à mesure qu'il est recouvert, l'artiste rend le trivial à la peinture (Sans titre, 1991-1995) Cet ensemble profus rappelle combien la prolifération est centrale dans le travail de Cognee qui, sans relâche, explore la saturation des grandes surfaces (Supermarche, 2003-2004), sculpte de nombreuses Têtes d'hommes (1989), exhaussées par une peinture gris-bleu, ou conçoit des centaines de terres de brique cuites, pareilles à des vanités (Nodules, 1991).
On ne peint jamais ex nihilo. On peint toujours après, et d'après- les œuvres anciennes et les grands maltres, qu'il s'agisse de Velázquez, de Rubens ou d'ingres: Non sans humour, Philippe Cognée reinvestit ainsi l'art ancien par sa technique de peinture à l'encaustique qui, singulière, engendre un monde tremblé, et trouble Proliferation et repeinture: telles sont les deux opérations majeures qui president bientôt au Catalogue de Bale
SAINT BARTHÉLEMY
[D'APRÈS PIERRE PAUL RUBENS]
2014-2016
Encaustique sur toile marouflée sur bois/Wax paint on
canvas mounted on wood
Courtesy de l'artiste et TEMPLON, Paris-Bruxelles-New York
Saint BARTHÉLEMY
Pierre Paul Rubens
MADAME MARCOTTE DE SAINTE-MARIE [D'APRÈS JEAN AUGUSTE DOMINIQUE INGRES]
2014-2016
Encaustique sur toile marouflée sur bois/Wax paint on
canvas mounted on wood Courtesy de l'artiste et TEMPLON, Paris-Bruxelles-New York
En 1826, Ingres peint le portrait de l'épouse de Marin Marcotte de Sainte-Marie, fonctionnaire du Trésor: s'y révèle toute son aptitude à rendre- la qualité des étoffes et la chair porcelainée du modèle. S'inspirant de ce chef-d'oeuvre du musée du Louvre, Philippe Cognée en réalise une copie dont la fidélité est balayée d'un coup de fouet - celui du fer à repasser sur la peinture à l'encaustique, lequel vient pulvériser la stricte ressemblance. Pas de sacrilege, ici, juste une manière de révéler ce qui, après l'ebraniement, résiste dans la peinture.
MADAME MARCOTTE DE SAINTE-MARIE
JEAN AUGUSTE DOMINIQUE INGRES
PHILIPPE IV [D'APRÈS DIEGO VELÁZQUEZ]
1994
Encaustique sur toile marouflée sur bois / Wax paint on Boulogne-Billancourt, collection Étienne Sandevoir
Philippe Cognée livre de nombreuses variations autour de la peinture de Diego Velázquez. Si la fraise amidonnée, la face mollement oblongue et les reflets dorés de la coiffure permettent d'identifier le fameux portrait de Philippe IV (1653-1655, musée du Prado), l'artiste perturbe ce principe de reconnaissance par l'action du fer à repasser sur l'encaustique, manière de chahuter les formes et de brouiller le regard. Révérence n'est pas servitude.
PHILIPPE IV
DIEGO VELÁZQUEZ
LE CATALOGUE DE BÂLE
D e 2013 à 2015, Philippe Cognée élabore Le Catalogue de Bâle, un ensemble saisissant par son ampleur - un millier d'œuvres - et son protocole - la systématisation de la repeinture. Chaque pièce est exécutée selon une meme règle, qui confine au rituel : prélevant des pages aux catalogues de la foire Art Basel, l'artiste peint une copie de et sur des reproductions d'œuvres.
Ce geste comporte une dimension politique : ce qui n'était qu'une re-production, qu'un artefact, redevient une œuvre à part entière, frappée par la gestualité et par la singularité, contre la marche impersonnelle du monde. Mettant toutes ces images à sa main, Philippe Cognée interroge la puissance iconique des œuvres premières - signées Georg Baselitz, Jeff Koons ou Pascale Marthine Tayou-, et les caprices du marché de l'art, avec ses discernements, ses oublis et ses angles morts.
Cet ensemble fut présente partiellement à deux reprises: en 2016, à la fondation Fernet-Branca, à Saint-Louis, dans le Haut-Rhin, puis à l'automne 2018, à l'espace Jacques-Villeglé, à Saint-Gratien, dans la région parisienne. Il se déploie au musée Bourdelle dans son exhaustivité, selon un parcours linéaire et labyrinthique érigeant cette repeinture en fil d'Ariane.
Quelques exemples
TÊTE DE SINGE HEAD OF A MONKEY
1989
Bois d'iroko peint à l'encaustique
Courtesy de l'artiste et TEMPLON, Paris-Bruxelles-New York
TÊTE DE TAUREAU HEAD OF A BULL
1989
Bois d'iroko peint à l'encaustique
Courtesy de artiste et TEMPLON, Paris-Bruxelles-New York
ANTOINE BOURDELLE BEETHOVEN, GRAND MASQUE TRAGIQUE BEETHOVEN, LARGE TRAGIC MASK
1901
Bronze
Paris, musée Bourdelle
GERMINATION ET FINITUDE
Depuis plusieurs années, Philippe Cognée s'intéresse à la chair des fleurs qui, épanouie ou fanée, triomphante ou putréfiée, engendre des formes baroques, serpentines et impétueuses De même que la fleur, la sculpture, et en particulier celle d'Antoine Bourdelle, est éminemment organique, déploie dans l'espace son corps comme sa peau, convoite la lumière et abrite une seve fragile qui la soumet aux caprices du temps
Partant de ce constat vitaliste, l'artiste a concu six toiles monumentales qui, seules ou formant un triptyque, fouillent l'efflorescence de la sculpture, quand la germination porte en elle l'ombre de la finitude, Aux amaryllis blanches, qui dessinent une choregraphie endiablée, pareille à celle de Loie Fuller ou d'Isadora Duncan, répondent des pivoines voluptueuses, d'une sensualité debridée, et des lys qui, blancs comme le plâtre, évoquent les moules du sculpteur, ces chrysalides énigmatiques.
Ces références aux ceuvres de Bourdelle- à l'énergie sauvage d'Herakles archer (1906-1909) ou à la douceur silencieuse de Pénélope (1905-1912)- rappellent combien la sculpture irrigue le travail de Philippe Cognée, ainsi que le réaffirme le dialogue entre sa Tête de taureau (1989) et le Grand Masque tragique. (1901) de son aine.
PIVOINE 1
2022
Encaustique sur toile marouflée sur bois Wax paint on canvas mounted on wood Courtesy de l'artiste et TEMPLON, Paris-Bruxelles-New York
AMARYLLIS 1
2022
Encaustique sur toile marouflée sur bois Wax paint on canvas mounted on wood
Courtesy de l'artiste et TEMPLON, Paris-Bruxelles-New York
TÊTE D'ENFANT
1989
Bois d'iroko peint à l'encaustique
Courtesy de l'artiste et TEMPLON, Paris-Bruxelles-New York